Émission du 28 juin 2018
Nous avons l'occasion de nous exporter et de vous conduire dans la ville d'Agen. Nous partirons sur les traces du poète Jacques Boé, mieux connu sous le nom de Jasmin, dans une visite de la ville avec Gèli Grande. Vous verrez aussi les images de la remise des prix du "Jasmin d'argent", concours de poésie né en 1921 qui comprend une catégorie occitane ; ces images sont accompagnées d'une interview de Jaume Carbonèl, qui est cette année le lauréat du prix de la Ville d'Agen.
Un reportage d'Amy Cros.
Né le 6 mars 1798 dans une famille pauvre de l'agenais, Jacques Boé (de son vrai nom) reçoit malgré tout une instruction et témoigne d'une véritable culture littéraire de son temps.Très jeune, il s'installe comme coiffeur à Agen. Cette période, suivant la Révolution, voit l'essor social d'un petit peuple ouvrier des villes à côté de la figure toujours importante des paysans des campagnes.
Son commerce rapidement florissant lui laisse le temps de se consacrer à sa passion pour l'écriture. Il choisir de s'exprimer en occitan, la langue du peuple :
« O ma lengo, tout me zou dit.
Plantarey uno estelo a toun froun encrumit » (graphie de l'auteur)
« Ô ma lenga tot m'o ditz.
Plantarai una estela a ton front encrumit. »
« Oh ma langue, tout me le dit.
Je placerai une étoile à ton front obscurci ».
(Épître à Charles Nodier « Des cranto de Paris »).
S'il n'appartient pas à proprement parler au milieu ouvrier, il vit en ville et le fréquente. On ne peut le qualifier de poète engagé, mais dans ses écrits, il se fait le témoin de son époque, défendant un style réaliste (qui n'empêche pas l'humour) et traitant de thématiques diverses telles que l'amour, les évolutions technologiques de son temps, et défendant des valeurs humanistes : la liberté, la charité...
Ses poèmes, s'ils furent imprimés dans divers recueils, sont avant tout destinés à être déclamés, voire chantés ! Grand orateur, Jasmin se produit devant un public de plus en plus nombreux : il entame très tôt un tour de France des régions (on dirait aujourd'hui une tournée !), se rendant d'un bout à l'autre de l'Occitanie pour présenter son œuvre à un public qui, tout en connaissant la langue, ne sait pas la lire. Ses apparitions se transforment peu à peu en véritables spectacles : il se produira ainsi à Toulouse accompagné de 20 musiciens et de plus de 380 figurants !
L'argent récolté lors de ses spectacles (plus d'un million et demi en 12 000 représentations) est reversé à des œuvres de bienfaisance.
Charles Nodier, académicien français, le découvre et lui ouvre les portes des salons parisiens. Il y rencontre tour à tour Lamartine, Ampère, Chateaubriand et sera même reçu par le roi Louis-Philippe en 1842.
Récompensé de prix littéraires par le Félibrige, l'Académie d'Agen, et, aussi surprenant que cela puisse paraître, par l'Académie Française, il est même fait chevalier de la Légion d'Honneur en 1845. Cependant, on peut supposer que l'intérêt qu'il suscite dans le monde parisien n'est pas dénué d'une certaine condescendance et demeure lié à l'exotisme que renvoie son image de « gascon » avec toutes les connotations positives comme péjoratives que cela suppose.
Après cette période de gloire, sa statue trône toujours à Agen, sa ville natale et Jasmin a laissé son nom à une rue parisienne ainsi qu'une station de métro !
« Poètes-ouvriers » est une appellation donnée à une génération d’auteurs et de poètes actifs durant le XIXe siècle. Employée dans les textes d’analyses littéraires occitanes depuis le début du XXe, elle revêt cependant des significations parfois différentes selon son contexte d’utilisation et ne fait, encore aujourd’hui, pas consensus.
D’abord parce que le concept « d’ouvrier » est en pleine évolution au XIXe siècle. La signification du mot telle qu’employée depuis le XVIIIe de « celui ou celle qui travaille à la main » se transforme en celle de travailleur de la grande industrie qui, au cours du XIXe siècle, est en plein développement.
Ensuite parce que le terme « ouvrier » peut avoir indistinctement trait à des patrons aisés du secteur manufacturier, à des propriétaires terriens ou des ouvriers de la plus simple condition.
Enfin, parce que la question du thème traité par le « poète-ouvrier » dans ses écrits se pose à plusieurs titres : un auteur travaillant dans le secteur de l’industrie peut-il être considéré comme « poète-ouvrier » s’il écrit un texte purement comique et sans aucune forme de réflexion sur son contexte social ? Et à l’inverse, un prêtre publiant un texte à propos de sa condition sociale et de celle de ses fidèles peut-il être considéré comme un « poète-ouvrier » ? De même, pour un haut-fonctionnaire rédigeant un texte à propos de la misère sociale dont il peut être témoin.
Ces différentes problématiques inhérentes au concept même de « poète-ouvrier », ainsi que l’émergence au début du XXe siècle de la littérature prolétarienne, autre genre littéraire proche mais distinct, ont mené les chercheurs contemporains à faire évoluer la notion vers celle de « voix d’en bas » embrassant ainsi un corpus littéraire plus large mais plus clair et dont l’illustration la plus récente est la publication en 2009 de l’ouvrage collectif Mémoires de pauvres, qui interroge individuellement la situation sociale de neuf auteurs occitans pouvant être rattachés à l'appellation « poète-ouvrier ».
Le premier spécialiste ayant employé la notion de poète-ouvrier pour la littérature occitane est le félibre, écrivain et professeur de langue et de littérature provençale, Émile Ripert, dans sa thèse La Renaissance provençale : 1800-1860. Il y consacre la seconde partie de son second chapitre « Les poètes-ouvriers en Provence ». S’il n’y définit pas la notion de « poètes-ouvriers », ne faisant qu’une présentation des auteurs qu’il intègre au mouvement, il effectue, dans le chapitre précédent, une analogie entre « poésie-ouvrière » et « poésie-populaire » et sous-entend que ces notions sont plus générationnelles qu’esthétiques ou littéraires. Les « poètes-ouvriers » y sont ainsi présentés comme les héritiers des « protecteurs de la poésie populaire » : comme les influents George Sand et Alphonse de Lamartine, tous deux poètes, actifs contributeurs de la vie intellectuelle et littéraire française du XIXe siècle et promoteurs de la mouvance d’émancipation populaire par la littérature. L'appellation est donc employée pour une génération de poètes actifs durant la période romantique et n’a pas été pensée pour être interprétée au pied de la lettre quant à l’activité professionnelle des auteurs auxquels elle fait référence. Elle reflète davantage le paternalisme de la bourgeoisie littéraire française vis-à-vis d’une génération d’auteurs nouvelle ainsi que sa vision presque idéalisée de sa situation professionnelle.
L'appellation « poète-ouvrier » disparaît avec la période romantique en ayant eu une influence bien plus importante pour la littérature française que la littérature occitane. Elle s’est ainsi surtout employée durant une période comprise entre la Monarchie de Juillet et le début du Second Empire soit entre 1830 et 1852.
Par la suite, plusieurs spécialistes de la littérature vont tenter de définir cette notion ou plutôt de redéfinir le concept même de « poète-ouvrier », trop sujet à interprétation. La proposition retenue aujourd’hui par les spécialistes du domaine occitan est celle proposée par Edmond Thomas dans son livre Voix d’en bas : la poésie ouvrière du XIXe siècle, édité chez François Maspero en 1979, dans la troisième note de la page 22 :
Il n'y a pas d'ouvrier dans le sens où on l'entendra à partir des années 1840. Le sens actuel de "travailleur de la grande industrie" ne pouvait naître qu'avec celle-ci. Le mot est donc encore pris dans le sens où l'employaient Rousseau et les hommes du XVIIIe siècle : "celui ou celle qui travaille à la main à quelque ouvrage que ce soit. Tout artisan qui travaille de quelque métier que ce soit" (Trévoux 1771). Je l'utilise dans ses acceptions successives, mais il est évident que la première poésie ouvrière, également antérieure aux grandes concentrations urbaines, ne pouvait être écrite que par des artisans. D'autre part, l'ambiguïté de certaines désignations de métiers peut faire courir le risque d'assimiler des patrons aisés ou propriétaires terriens bien pourvus à des ouvriers : imprimeur, cultivateur, vigneron, horloger-bijoutier, graveur par exemple.
Au delà des difficultés intrinsèques de définition de la notion de « poète-ouvrier », l’histoire littéraire occitane connaît des difficultés spécifiques pour adapter ce concept à ses propres auteurs.
La principale difficulté est directement liée à la situation économique de l’Occitanie (au sens de territoire géographique s'étendant de Bordeaux à Nice en remontant jusqu’à Clermont-Ferrand) qui connaît au XIXe siècle un développement industriel bien moins important que dans le Nord de la France limitant de par ce fait l’existence même de poètes-ouvriers potentiels. Cette difficulté est également accentuée par l’éloignement géographique des cercles littéraires parisiens qui impulsent les modes, protègent et parrainent des auteurs en devenir mais bien souvent résidant plus près de la capitale. Seuls quelques rares auteurs comme Jasmin parviendront à faire tomber la barrière linguistique qui séparent alors les poètes occitans de la reconaissance nationale.
Le XIXe siècle marque un tournant pour la littérature occitane. Celle-ci connaît un regain de vitalité extrêmement important d’abord impulsé par les romanistes, précurseurs d’un grand mouvement d’étude de la poésie des troubadours. Les poètes-ouvriers, épiphénomènes d’un élan plus vaste de renouveau littéraire leur emboîtent le pas bientôt suivis par le Félibrige, dont le chef de file, Frédéric Mistral, sera couronné par le Prix Nobel de littérature en 1904.
Les poètes ouvriers s’inscrivent ainsi dans le second temps de l’histoire littéraire occitane du XIXe siècle. S’ils sont pour certains parvenus à rencontrer un succès populaire parfois localement important leurs situations professionnelles très diverses couplée à une appellation vague pouvant être sujette à interprétation a mené le concept à évoluer aujourd’hui vers une acception plus large du sujet aussi bien sur le concept de poète que sur celui d'ouvrier.
La liste ci-dessous est proposée à titre provisoire et reste ouverte à toutes suggestions et redéfinitions du corpus auquel elle fait référence.
Identité de l'auteur | Origine géographique | Profession(s) | Lien vers les œuvres disponibles sur Occitanica | Lien vers la biographie de l'auteur |
Abric, Louis | Lunel, (Hérault) | Boulanger | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Allavène, Adolphe | Aix-en-Provence, ; Marseille, (Bouches-du-Rhône) | Doreur-Miroitier | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Arnaud, Joseph | Vaucluse | Cordonnier | ||
Astier, Jean-Baptiste | Marseille, (Bouches-du-Rhône) | Cristallier | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Aubry, François | Avignon, (Vaucluse) ; Nîmes, (Gard) | Serrurier | ||
Bellot, Pierre | Marseille, (Bouches-du-Rhône) | Marchand et fabricant de drap | ||
Bénazet, Olympe-Louis | Toulouse, (Haute-Garonne) | Nombreux métiers dont chanteur des rues | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Benoît, Robert | Périgueux, (Dordogne) | Coiffeur | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Blanc, François | Marseille, (Bouches-du-Rhône) | Cordonnier | ||
Boillat, Justin | Nîmes, (Gard) | Commis chez un marchand de vin puis greffe au tribunal de commerce | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Boissier, Auguste | Die, (Drôme) | Artisan-tanneur | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Bonnet, Pierre | Beaucaire, (Gard) | Cafetier | ||
Borghero, Louis | Marseille (Bouches-du-Rhône) | Tonnelier | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Brousse, Guillaume | Fonbarrade (Lot-et-Garonne) | Laboureur | ||
Caillat, Jean-Baptiste | Bouches-du-Rhône | Serrurier | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Carvin, Jean-Baptiste | Marseille (Bouches-du-Rhône) | Musicien | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Cassan, Denis | Avignon, (Vaucluse) | Prote | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Castela, Jean | Tarn-et-Garonne | Meunier | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Cazaux, Jacques | Montréjeau, (Haute-Garonne) | Tailleur | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Cazes, Antoine | Millau, (Aveyron) | Fumiste | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Chauvier, Philippe | Bargemon, (Var) | Forgeron, ouvrier cloutier | ||
Cluzel, Pierre | Sauzet, (Drôme) | Tailleur | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Coumbettos, dit Couquel | Castelnaudary, (Aude) | Tourneur | ||
Courbin, Jean | Portets, (Gironde) | Forgeron, serrurier | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Daniel, Claude | Nîmes, (Gard) | Ouvrier typographe | ||
Delbès, Antoine | Agen, (Lot-et-Garonne) | Tailleur | ||
Desanat, Joseph | Tarascon (Bouches-du-Rhône) | Divers métiers dont : taillandier, forgeron puis charcutier | ||
Favier, François | Avignon, (Vaucluse) | Marbrier | ||
Fédières, Adrien | Montpellier, (Hérault) | Maître-maçon | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Galséran, Félix | Marseille, (Bouches-du-Rhône) | Tonnelier | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Gélu, Victor | Marseille, (Bouches-du-Rhône) | Nombreux métiers dont cheminot | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Granier, André-Louis | Marseille, (Bouches-du-Rhône) | Forgeron | ||
Grenier, Arnaud | Lot | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | ||
Grivel, Roch | Crest, (Drôme) | Tisserand | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Gruvel, Josselin | Haute-Garonne | Ouvrier corroyeur | ||
Guisol, François | Brignoles, (Var) | Tanneur | ||
Honnoré, Louis | Marseille, (Bouches-du-Rhône) | Ouvrier typographe | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Jasmin | Agen, (Lot-en-Garonne) | Coiffeur | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | Biographie de l'auteur |
Julié, Louis | Millau, (Aveyron) | Ouvirer gantier | ||
Lacombe, Joseph | Caussade, (Tarn-et-Garonne) | Menuisier | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Lacroix, Mathieu | Gard | Maçon | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Laugier, Fidèle | Marseille, (Bouches-du-Rhône) ; Var | Cordonnier | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Maillet, Alphonse | Vaucluse | Tailleur | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Mazabraud, Joseph | Haute-Vienne | Tailleur | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Mengaud, Lucien | Toulouse, (Haute-Garonne) | Peintre, bijoutier | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Palay, Jean | Pyrénées-Atlantiques | Tailleur | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Payan, Toussaint | Marseille, (Bouches-du-Rhône) | Ouvirer tonnelier | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Pélabon, Louis | Toulon, (Var) | Voilier | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Petit, Jean | Creuse | Maçon et tailleur de pierre | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Peyrottes, Jean-Antoine | Clermont-l'Hérault, (Hérault) | Potier | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | Biographie de l'auteur |
Poncy, Charles | Toulon, (Var) | Maçon | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | Biographie de l'auteur |
Mestre Prunac ; Liberat, Jacques | Sète, (Hérault) | Boulanger | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Reboul, Jean | Nîmes, (Gard) | Boulanger | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Revel, Pierre Marie | Aude | Prêtre | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Richier, Amable | Maréchal-ferrant | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | ||
Rieu, Charles | Bouches-du-Rhône | Maçon | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Rigal, Jean | Agen, (Lot-en-Garonne) | Tailleur | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Roch, Hippolyte | Montpellier, (Hérault) | Ferblantier | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Tavan, Alphonse | Bouches-du-Rhône | Cultivateur puis employé des chemins de fer | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Verdié, Jean-Antoine | Bordeaux, (Gironde) | Boulanger, grenadier, vannier, marchand de journaux | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | Biographie de l'auteur |
Vestrepain, Louis | Toulouse, (Haute-Garonne) | Cordonnier-bottier | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | Biographie de l'auteur |
Veyre, Jean-Baptiste | Cantal | Sabotier | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Vidal, Jean-Paul | Issel, (Aude) | Potier | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana | |
Younet, Jean | Montauban, (Tarn-et-Garonne) | Voir les œuvres de et sur l'auteur disponibles sur Occitana |
Place Jasmin, Agen (47000)
La ville d'Agen, qui avait au lendemain de la mort de Jasmin pris en charge ses funérailles, rend une nouvelle fois hommage au poète en érigeant place Saint-Antoine, une statue à sa gloire. Elle fait pour l'occasion appel au soutien des admirateurs du poète par le biais d'une souscription.
Réalisée par le sculpteur Vital-Dubray, la statue est dévoilée le 12 mai 1870. Installée sur son socle dès le 22 avril, elle reste jusqu'à cette date dissimulée sous un long voile sombre qui cache ses traits en attente de l'inauguration officielle (cf. CRDP de Bordeaux. C6076, « La statue de Jasmin ». C. Rapin).
Celle-ci se déroule quelques jours plus tard en présence des proches de Jasmin (sa veuve, Magnonet et son fils, Édouard), des membres du Conseil municipal et sous la présidence du député-maire Henri Noubel. L'édile avait quelques mois plus tôt apporté son soutien à l'entreprise au nom du mouvement de défense et de reconnaissance de la langue d'oc, en offrant 50 francs à la souscription. Au son des fanfares et des discours, la journée est dédiée à la mémoire de Jasmin. Frédéric Mistral, venu pour l'occasion de Provence, représente le Félibrige. Les deux hommes ne se sont pourtant jamais rencontrés. Jasmin en effet, autodidacte indépendant, ne fonda jamais d'école autour de son action littéraire comme linguistique, et répondit par la négative à la demande du Félibrige de rejoindre ses rangs. En ce 12 mai 1870 toutefois, Frédéric Mistral adresse au poète d'Agen un vibrant hommage, reconnaissance du rôle joué par son prédécesseur en faveur de la langue occitane.
Début XIXe siècle
Vital-Dubray(1857-1912) – sculpteur, auteur de la statue
Jacques Jasmin (1798- 1864) – sujet de la statue
Jacques Jasmin, poète agenais, figure aux côtés du Provençal Frédéric Mistral, lauréat du prix Nobel de littérature en 1904, parmi les auteurs occitans phares du XIXe siècle. Avec eux, la littérature occitane fait son entrée dans les salons parisiens et acquiert une reconnaissance nouvelle. Jasmin, précurseurs des félibres, ces poètes réunis autour de Mistral, Roumanille ou Brunel, pour la sauvegarde de la langue occitane, n’appartint pourtant à aucun mouvement et se refusa, en dépit de son succès, à former école autour de son œuvre. Il laisse à sa mort, une importante production, depuis lors toujours lue et éditée.
Né le 6 mars 1798 dans une famille modeste de l'Agenais, Jacques Jasmin, de son vrai nom, Jacques Boé, s'installe à son compte en tant que coiffeur dans le quartier du Gravier à Agen dès l'âge de 18 ans. Le jeune homme se livre parallèlement à sa passion pour l'écriture, publiant dès 1822 sa première œuvre dans le Journal du Lot-et-Garonne : Fidelitat ageneso. La parution dix ans plus tard de ses Papillotos
et sa rencontre avec Charles Nodier, le charisme dont fait preuve le poète, brillant orateur, permettent à Jasmin d'acquérir au fil des années ses lettres de noblesses dans le domaine de la littérature, lui qui fait figure d'exception en proposant une œuvre en langue d'oc. Lauréat de nombreuses récompenses dans sa ville comme au rang national - il est honoré du prix Monthyon de l'Académie française, et le jeune Félibrige lui décerne le titre de « Maître-ès-jeux » - Jasmin demeure malgré tout pour la scène littéraire parisienne ce poète-perruquier, selon les mots de Balzac ; poète « patois » victime de préjugés qui entachent sa pleine reconnaissance. Jasmin s'éteint en 1864, le 4 octobre, en pleine gloire. Son enterrement attire les foules tout comme l'inauguration officielle de la statue qui lui est dédié six ans plus tard.
Bronze – statue
Plâtre – médaillon
La sculpture dressée sur la place Saint-Antoine (rebaptisée place Jasmin le 9 mai 1883), non loin de l'ancien salon de coiffure de Jasmin, est une réalisation du sculpteur Gabriel Vital-Dubray (1813-1892). Faite de bronze, elle faillit être fondue durant l'occupation allemande afin que soit récupéré le précieux métal.
Jasmin est représenté appuyé à une colonne, contre laquelle est posée une lyre, rappel de sa fibre poétique. L'auteur est d'ailleurs immortalisé dans une posture oratoire – on retrouve cette même pose, bras droit levé, main gauche sur le cœur dans une lithographie de Bertrand et Oudin- vêtu d'une redingote, son col enserré d'un noeud papillon, montre de gousset apparente.
Le socle, colonne quadrangulaire, porte différentes informations. Sur la face principale, placés sous l'inscription « À Jasmin », se trouve une plaque figurant deux anges, une lyre et la mention Immortalitat.
Une autre plaque, placée à l'opposé de la précédente, est un rappel aux généreux donateurs à l'origine de l'érection de la statue en mai 1870.
Une dernière enfin, placée au côté droit de la statue, est une citation de Jasmin lui-même : " O ma lengo, tout me zou dit, Plantarey uno estelo a toun froun encrumit »/ « Oh ma langue, tout me le dit. Je placerai une étoile à ton front obscurci ». Ces vers sont extraits de l'épître à Charles Nodier « Des cranto de Paris ».
Jacques Boé dit Jasmin (1798-1864), est une des figures du renaissantisme occitan au XIXe siècle. Quelques années avant l'apparition du Félibrige, ce coiffeur agenais, poète autodidacte, entreprend une œuvre en langue d'oc qui le fera passer à la postérité, faisant de lui le premier poète occitan de l'époque contemporaine à acquérir une dimension national. Ami de Sainte-Beuve, de Franz Liszt, reçu par le roi à Paris, Jasmin s'est aussi abondamment illustré dans la grande cité voisine d'Agen, à Bordeaux, où il venait régulièrement présenter et déclamer ses poèmes, suscitant des vocations, et les prémices d'un renouveau occitan dans la région bordelaise. C'est donc à la bibliothèque municipale de Bordeaux que sont conservés une partie de ses manuscrits et quelques documents personnels lui ayant appartenu.
Modalités d'entrée :Achat
Accroissement :Fonds ouvert (peut connaître des accroissements)
Le dossier Jasmin coté Ms 2096 a été acquis en 1959 par la bibliothèque municipale de Bordeaux. Il renferme quarante-deux documents dont, otre des lettres, des brouillons, un portrait du poète et quelques documents sedondaires, des manuscrits autographes de Jasmin écrits en occitan. Il est à signaler que le Ms 2096 ne fait pas partie des volumes édités du Catalogue Général des Manuscrits. Dossier inventorié
Dates extrêmes :XIXesiècle
Langues représentées dans le fonds :occitan
Importance matérielle :Quarante-deux pièces.
Supports représentés :Manuscrits
Ms 2096
Instruments de recherche disponibles :
Conditions de consultation :
Pas de restrictions.
Conditions de reproduction :Pas de restrictions.