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Minerve : presqu'île de pierre
Centre inter-régional de développement de l'occitan (Béziers, Hérault)
Minerve, entre Cévennes et Montagne Noire, porte d'entrée du Parc naturel régional du Haut-Languedoc, attire chaque année touristes et curieux venus découvrir un site naturel grandiose, et une cité au riche patrimoine historique. (immersion totale sur les lieux du drame + Musée Hurepel). 

Minerve constitue après Béziers et Carcassonne, le troisième fait d'armes important de la Croisade des Albigeois. Le siège qu'elle endure au cours de l'année 1210 marque également un tournant dans le conflit. Après une vague de succès rapides dans le camps croisé, on assiste de la part du camp méridional à un apparent sursaut. Alors survient l'épisode de Minerve et de son bûcher, le premier d'une longue série.

 

I/ Le roc de Minerve / Lo ròc de Menèrba

A/ Minerve, presqu'île de pierres

Minerve, capitale historique du Minervois, se dresse à près de 200 m d'altitude, une cité de pierre surplombant le causse. Comme tout droit sortie de terre, la ville domine les gorges de la Cesse et du Brian qui ont au cours des millénaires, dessiné ici des reliefs tortueux dans la roche, reliant la cité à ses environs au gré d'un ensemble de ponts naturels. De fait, le site de Minerve n'est à l'époque relié au nord que par un isthme d'une dizaine de mètres de large (cf.FERRER, Jean-Pierre. Le petit guide de Minerve, village du Minervois dans l'Hérault : à l'usage des écoliers, des collégiens et des visiteurs. [S.l.] : J.-P. Ferrer, 1990. P.17).
 
Ce site géologique d'exception offre a priori toutes les conditions d'un site protégé, une forteresse naturelle imprenable. De fait les seigneurs de Minerve y construisirent un premier castrum, château et village accueillant quelques dizaines d'âmes. Au IXe siècle, alors que l'autorité centrale de Carcassonne s'effrite au gré des luttes d'influences internes, les seigneurs de Minerve obtiennent que leurs terres soient érigées au rang de vicomté. La cité demeure toutefois vassale des comtes de Carcassonne, puis, à la faveur de l'achat d'une partie des terres par les Rois d'Aragons, elle passe également sous l'autorité de ces derniers, réunissant ainsi dans ses protecteurs, les principaux acteurs du drame cathare.
 


B/ Minerve et le catharisme dans le tournant des années 1208-1210

Au début du XIIIe siècle, alors qu'éclate la Croisade des Albigeois, le vicomte de Minerve porte le nom de Guilhem. Ce seigneur, dont les sources semblent indiquer qu'il ne se convertit pas lui-même au catharisme, semble toutefois avoir témoigné une certaine tolérance vis-à-vis des « bonshommes » qui trouvent en Minerve un abri (CORDES, Léon. Le petit livre de Minerve / Lo pichòt libre de Menèrba. [S.l.] : [s.n.], 1974 (Lodève) : impr. des Beaux-Arts). P.64). Parmi cette foule de cathares inconnus, se distingue un nom, celui du troubadour Raymond de Miraval.
 
Le catharisme, branche qualifiée d'"hérétique" par l'Église catholique, prend forme au milieu du XIIe siècle. Ses adeptes se font appeler vrais chrétiens ou Bons hommes. Le catharisme diffère du christianisme sur un certain nombre de points. Sont notamment rejetés les principes de l'incarnation dans la communion et le récit de la Passion du Christ, tandis que l'accent est mis au contraire sur la Pentecôte, la transmission de l'Esprit aux apôtres, ainsi que sur le consolament, l'imposition des mains, placé au cœur de leurs rituels (cf. Patrimoines en Minervois : Histoire, mémoires et territoire. « Minerve, 1210, de roc, de sang et de cendres ». Eté 2010. Pp.5-6).

Ces "Parfaits" trouvent dans le Midi de la France un terreau favorable à leur développement, où ils mènent une vie austère et dépouillées propre à leurs croyances. La prédication s'y fait dans la langue vernaculaire maternelle de leurs disciples, la langue d'oc. Portée originellement par des prédicateurs itinérants, l'Église cathare se structure progressivement se dotant d'une hiérarchie propre, sur le modèle des églises chrétiennes primitives et compte dans le Midi trois évêchés principaux : ceux de l'Albigeois, du Toulousain et du Carcassès, le Minervois dépendant de ce dernier. (cf. Patrimoines en Minervois : ibid).
 
Au tournant de 1208, le Pape Innocent III lance contre les cathares jugés hérétiques, une grande croisade à la suite de l'assassinat de son légat Pierre de Castelnau, aux environs de Saint-Gilles. Débute alors un conflit d'une vingtaine d'années (1208-1229), tant religieux que politique, conduisant tant à la disparition du catharisme qu'au rattachement du Languedoc à la couronne de France.

 II/ Le siège de 1210

A/ Simon de Montfort, seigneur de Carcassonne

Dans la longue série de batailles et de sièges qui émaillent le conflit cathare, le siège de Minerve de 1210 constitue chronologiquement le troisième événement important, derrière le sac de Béziers en 1209 et la prise de Carcassonne la même année (cf. BOYER, Charles. Le siège de Minerve : 1210. Carcassonne : E. Roudière, 1934. P.5). 

Suite à ces deux faits d'armes et à la mort du seigneur Trencavel dans les geôles carcassonnaises, Simon de Monfort devient maître des terres du défunt vicomte. Dans les faits, ces terres nouvelles demeurent à conquérir. Le nouveau maître de Carcassonne - dont l'autorité n'est pas reconnue par Pierre II d'Aragon, son suzerain - doit également faire face à de nombreuses révoltes et à des trahisons au sein même de ses proches, comme Guiraud de Pépieux (cf. Patrimoines en Minervois, ibid, p12).

Ainsi, après les succès rapides des croisés dans les premiers temps du conflit, le début de l'année 1210 est marqué par un ralentissement tandis que côté Cathares et leurs alliés, les rangs se resserrent, une organisation nouvelle se met en place. Sentant le vent tourné, Simon de Montfort comprend qu'il lui faut consolider ses premières victoires (cf. BOYER, Ch. Ibid. P.5). Dans cette "Guerre des châteaux" qui débute, la zone Corbières / Minervois constitue la clé de voûte stratégique afin de tenir tout le pays. La chose est ardue, et c'est consécutivement à la défaite de Cabaret du mois de juin 1210, que Montfort entreprend le siège de la cité sur le roc, Minerve (CORDES, ibid. Pp.64-65).

 

B/ Le siège et ses légendes

À l'instar de bien des épisodes de la Croisade des Albigeois, le siège de Minerve nous est rapporté par La Canso ou Chanson de la Croisade Albigeoise, texte contemporain des événements, ainsi que via l'Historia Albigensis (Petri Vallium Sarnai monachi) et L'histoire anonyme de la guerre des Albigeois de Dom Vic et Dom Vaissette (Histoire générale de Languedoc, Toulouse, édit, Privat, 1874-1894, t.VIII, p.46.).

 
Le siège de Minerve nous y est retranscrit avec force détails, dont certains demeurent sujets à caution. En voici les grands traits. C'est au mois de juin 1210 que s'ouvre le siège de Minerve. Les troupes de Simon de Montfort prennent alors place aux pieds d'une cité réputée inexpugnable. Elles ont été rejointes par les troupes alliées narbonnaises, auxquelles certaines sources attribuent d'ailleurs la responsabilité du siège (dont Jean-Pierre Sarret), nouvel épisode de la lutte fratricide qui oppose Narbonne et Minerve, et dépasse les cadres du conflit albigeois. A leurs côtés, se trouvent également un légat du pape, Arnaud-Amaury, chef religieux de la croisade, Bérenger l'archevêque de Narbonne, les évêques de Riez, Raymond d'Uzès, Foulques de Toulouse, Raynald de Béziers et le chanoine Thédise de Gènes. Les forces en présence peuvent être estimées à 1000 d'un côté, contre 400 certainement du côté des assiégés. (cf.p.12, Guide du voyageur de Minerve).

Débute alors une guerre d'usure entre assaillants et assiégés. Les remparts sont attaqués par les catapultes et trébuchets menés sur place par les troupes croisées. Les trois mangonneaux et un pierrier géant, la Malavesina en occitan (Malvoisine en français), mitraillent de manière continue les murs de la cité. Le siège se poursuit ainsi durant sept semaines. Les Minervois, comme avant eux les Carcassonnais (cf. NELLI, René, Carcassonne d'heureuse rencontre, Aix-en-Provence : Edisud, 1980), sont finalement pris en défaut par le manque d'eau. La destruction du puits Saint-Rustique, leur principal point d'alimentation en la matière, les privent d'une denrée vitale, réel talon d'Achille des assiégés. (CORDES. Ibid. Pp.66-67).

A la mi-juillet face à une situation qui se dégrade progressivement, Guillaume de Minerve engage les pourparlers. "Le légat suggéra aux deux adversaires de rédiger par écrit et séparément les conditions de la reddition." Face aux demandes des assiégés, Montfort rejette toute conciliation. La capitulation minervoise advient finalement le 22 juillet après 7 semaines de siège. Le légat du pape se voit confier la mission de l'après : le sort des vaincus est placé entre ses mains. La conversion ou le bûcher telle est à grands traits, la politique du prélat. (BOYER. Ibid. P.13) De fait, ce sont près de 140 cathares qui sont menés au feu, constituant une triste première dans une série qui émaille par la suite l'ensemble de la Croisade.

La ville occupée par les croisés, devient possession de Simon de Montfort et avec elle, l'ensemble de la vicomté. Ce succès rapide après une série de déconvenues côté croisés, relance les troupes de Simon de Montfort sur les voies de la conquête. Ainsi Peyriac et Rieux, deux des principales villes du Minervois, qui avaient résisté jusqu'alors, ne tardent pas à succomber à leur tour (voir Douais, la soumission de la vicomté de Carcassonne Boyer p44).

L'ancien seigneur de Minerve, Guilhem IV reçoit en échange quelques terres nouvelles aux environs de Béziers. Il s'engage alors, puis son fils après lui, dans la résistance aux côtés des Trencavel. La Canso le place ainsi à Beaucaire en 1216 (La Canso de la Crozada, laisses 167 et 169. Réédition numérique de P.Meyer), siège qui voit la défaite de Simon de Montfort, et à Toulouse en 1219. Son ancienne vicomté, occupée par les troupes croisées, ne prendra pas part aux soulèvements. En 1242, la vicomté de Minerve est supprimée, devenant chef-lieu de bailliage. Dernière étape, le 11 mars 1258, le roi d'Aragon cède tous ses droits sur le Carcassès et le Minervois à Louis IX à l'occasion de la signature du traité de Corbeil. (Guide du Visiteur de Minerve p.13).


III/ Minerve, dans la légende

A/ Un siège légendaire

Cité inexpugnable, château de pierre au milieu des causses, mais surtout premier des bûchers de la Croisade, bien des images accompagnent l'épisode de Minerve. De fait, de nombreuses histoires vinrent enrichir la légende du Siège de la capitale Minervoise.
Dans son Òme de Menèrba, dont la trame puise dans le légendaire local, Léon Cordes revient notamment sur l'une des épisodes clés de l’événement. Ainsi l'histoire voudrait que d'une trahison serait advenu la fin du siège. Une fille de Minerve, qui avait son ami dans les troupes de Montfort (comptant en effet des troupes locales, notamment les alliés narbonnais), aurait ainsi confié aux croisés le talon d'Achille de la ville : le manque d'eau et la réserve principale constituée par le puits. (CORDES. Ibid. Pp.66-67). Le puits, élément clé dans la stratégie poliorcétique, a marqué l'imagination populaire aussi bien que celle des auteurs, et de fait, l'on trouve de bien nombreuses versions de l'épisode Minervois : Jeanne Boujassy, J. de la Cave, Georges Bordonove...
 
"Monument" du patrimoine oral et musical occitan, le chant du bouvier, Lo Boièr, serait pour certains, un souvenir du bûcher de Minerve, entonné par les cathares durant leurs derniers moments. Ils soulignent à ce propos l'ambivalence d'un chant aux paroles parfois burlesques interprété comme un chant sacré. Ces mêmes paroles seraient d'ailleurs ambiguës à dessein, afin de cacher leur véritable nature aux troupes de l'Inquisition. Toutefois, la nature religieuse de ce chant reste à démontrer. René Nelli le classe ainsi dans les chants de métier, d'ailleurs postérieur à la croisade. (cf. NELLI, R. Ibid. P.72).
 
Les légendes touchent également le patrimoine naturel local, fortement propice à débrider les imaginations. La cité de Minerve possède notamment plusieurs grottes, celle de l'Aldène notamment dont l'histoire inspira en son temps l'auteur occitan Achille Mir au XIXe siècle : « Passejado dal 17 d'octobre 1884 a la groto de Minerbo ». Une grotte également dite de Minerve, de Fauzan ou de la Coquille, qui inspira d'ailleurs une trentaine d'année plus tôt, le poète narbonnais Hercule Birat (cf. La semaine du Minervois du 8 août 2013, pp.7-10). Le minervois Léon Cordes rapporta dans son Pichòt libre sus Menèrba, une légende sur l'une de ces balmas (grotte en occitan). L'histoire voudrait qu'une d'entre elles, aménagée en souterrain, permette via la sacristie de circuler sous la ville. Ces grottes ne contiendraient-elles pas les trésors et réserves de toutes sortes des cathares réfugiés dans la ville avant 1210 ? (cf. CORDES. Ibid. P.60).

 

 

Bibliographie

 
BOYER, Charles. Le siège de Minerve : 1210. Carcassonne : E. Roudière, 1934. (Cote CIRDOC : CAC 6508).
 
CORDES, Léon. Le petit livre de Minerve / Lo pichòt libre de Menèrba. [S.l.] : [s.n.], 1974 (Lodève) : impr. des Beaux-Arts). (Cote CIRDOC : 988.94 MIN).
 
FERRER, Jean-Pierre. Le petit guide de Minerve, village du Minervois dans l'Hérault : à l'usage des écoliers, des collégiens et des visiteurs. [S.l.] : J.-P. Ferrer, 1990. (Cote CIRDOC : CBB : 417-21).
 
NELLI, René, Carcassonne d'heureuse rencontre, Aix-en-Provence : Edisud, 1980. (Cote CIRDOC : 988.97 CAR).
 
Patrimoines en Minervois : Histoire, mémoires et territoire. « Minerve, 1210, de roc, de sang et de cendres ». Eté 2010. ( Cote CIRDOC : H3).
 
La semaine du Minervois. N°du 8 août 2013, pp.7-10
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Lo jòc de bala al tambornet
Centre inter-régional de développement de l'occitan (Béziers, Hérault)

Un caillou, puis une balle, une main, puis une raquette... au fil des siècles et de par le monde, les hommes ont créé tout un panel de jeux dits de paume. Le tambornet, jeu traditionnel du Languedoc figure dans cette grande famille. Comme la plupart des sports traditionnels, sa pratique a évolué avec le temps afin de coïncider avec les pratiques culturelles et sportives modernes. Jeu typique du Languedoc, il s'est depuis développé hors de ses frontières naturelles au gré des migrations et des rencontres avec d'autres jeux de paume similaires. Au cours du XXe siècle, sa pratique connaît successivement un essoufflement avant que l'action de différents passionnés, dont l'auteur occitan d'Argelliers, Max Rouquette, ne concoure à un renouveau et à une restructuration de ce sport.

Du jeu de paume au jeu de tambourin

Naissance et évolution

Des jeux de balles de l'Antiquité jusqu'au jeu de paume

Le jeu est pour l'homme, tant un défouloir qu'un mode d'apprentissage. Réflexes de chasse ou de guerre, éléments de sociabilité et de dépassement de soi... on trouve trace de jeux de types divers dès les plus hauts temps de l'humanité.

Le pourtour méditerranéen voit ainsi très tôt apparaître différents jeux pratiqués à même la main, d'où la dénomination de jeu de "paume" : Égypte, Grèce, Empire Romain, les grandes civilisations de l'Antiquité ont toutes laissé des témoignages de pratiques diverses, telles les sources peintes de Beni Hassan en Égypte (cf. Rouquette, Max. Le Livre du Tambourin : un grand sport international en plein essor, Montpellier , CRDP, 1986. p.12 ). Le jeu de paume semble pénétrer en France via le monde romain. Dès lors, le jeu se développe progressivement dans les différentes régions du Royaume, que ce soit dans l'évêché de Rouen ou dans la province du Languedoc.

C'est à compter du XIVe siècle que ce sport apparaît dans les sources écrites. L'humanisme de la Renaissance, prônant le principe d'un "esprit sain dans un corps sain", porte un nouvel éclairage sur le jeu de paume. Pétrarque l'évoque dans son De remediis ultriusque fortunae (1320-1336), tout comme le médecin de Padoue, Mercurile (De gymnastica). Tous souligne les apports de cette pratique, combinant adresse et réflexion. Les jeux de paume, dans le sens de "jeux de balles", se développent ainsi dès l'origine tant auprès des élites, qu'auprès d'un plus large public.

La naissance d'un sport occitan : langue et coutumes d'une région

Les jeux de balles ou jeux de paume, présentent en France une grande variété de formes fonction des régions qui les pratiquent. Le Pays Basque a sa pelote (basque), le Languedoc son tambornet

 Le jeu de balle au tambourin appartient à la branche des jeux de longue-paume, une forme pratiquée en France depuis le Moyen Âge (cf. GUIRAUD, Christophe. Espaces sportifs et usages sociaux : étude comparative de l'implantation du rugby et du jeu de balle au tambourin dans le département de l'Hérault.  Paris, Institut National du Sport et de l'Education Physique, 1985. P.159). D'une branche commune, le jeu s'est ensuite adapté à son environnement, proposant un ensemble de règles spécifiques et un lexique original, produit dans la langue alors maternelle de cette région, l'occitan.

Les origines de ce sport progressivement passé dans la sphère populaire et le monde rural, notamment viticole, demeurent sujettes à caution. Face à l'insuffisance des sources concernant ce sport, de nombreuses hypothèses furent ainsi formulées, notamment la voie italienne du fait d'une similarité entre le "tambournet" et le "tamburello". Cette piste fut toutefois abandonnée. Le Tambourin a indéniablement une origine locale et demeure aujourd'hui comme hier le témoignage et le vecteur de la culture occitane régionale.

Principe et règles

Principe du tambornet

Le jeu de balle au tambourin est un sport individuel joué en équipe. (cf. Max Rouquette. Ibid. P.13). À l'instar des jeux de double dans un match de tennis, chaque individu joue seul face aux membres de l'équipe adverse. Au gré des évolutions et des codifications, le jeu de balle au tambourin a vu ses règles et son matériel évoluer, concourant à la création d'un sport qui tout en appartenant à part entière à la grande famille des jeux de paume, possède des caractéristiques propres qui le différencient.

Dans sa forme moderne, lo tambornet voit s'affronter deux équipes de cinq joueurs chacune sur un terrain de 80 mètres de longueur sur 20 mètres de largeur. Les équipes se font face de part et d'autre d'une ligne médiane tracée au sol, la « Basse ». Le principe du tambourin consiste à renvoyer dans le camp adverse, une balle. Celle-ci, en caoutchouc d'un diamètre réglementaire de 61mm, a aujourd'hui remplacé les balles faites en peau ou vessie d'animal. Chaque équipe compte deux cordiers, placés devant, un tiers placé au centre, et deux joueurs de fond, l'un ayant également pour mission d'engager le jeu, c'est le "batteur". Chacun des joueurs est doté d'un tambourin "classique", dont le format et l'apparence s'apparente à celle de l'instrument de musique.

L'apparition de cet outil est le fruit d'une réflexion ayant conduit à l'utilisation successive du battoir en bois des lavandières, puis celle d'un brassard, cylindre de bois tenu par le joueur à l'aide d'une poignée transversale. Le brassard est mentionné une première fois dans les sources écrites au cours du XVIe siècle (GILLAND, G. Histoire de Gignac de son origine à nos jours. Maurin-Lattes : Impr. du Paysan du midi, 1977. P.16). De nos jours, et depuis le XIXe siècle, le jeu se pratique à l'aide d'un tambourin tendu de tissu synthétique le plus souvent mais parfois encore, fait en peau de chèvre.

Un lexique natif en occitan

 Adaptation régionale dans sa forme de l'universel jeu de paume, le jeu de balle au tambourin est également languedocien par son lexique, l'occitan, langue maternelle des joueurs durant les siècles où se formèrent les principes et règles de ce jeu. Certains de ces termes ont depuis été traduits voire transposés en français. Demeure malgré tout un important lexique en occitan relatif à ce jeu, dont voici pour exemple quelques éléments et leur explication :
Alandar : faire voler la balle très haut.
Aquet : moitié du terrain qui fait face à la batterie.
Aquetar : reprendre la balle venue du battoir.
Arescle : cercle de lamelles concentriques en bois de mûrier qui constitue l'armature sur laquelle est tendue et clouée la peau parcheminée.
Aterrar : faire courir la balle sur le sol.
Bassa : ligne médiane des cinquante mètres ; se dit aussi d'une balle qui, à la mise en jeu par le batteur ne franchit pas cette ligne.
Bateure : battoir; batteur.
Ceuclar : se dit d'une balle qui dévie dans sa course en décrivant une courbe sur un plan horizontal
Clavels : clous: les clous de fer, fines pointes ; les clous de cuivre à tête large et arrondie servant à fixer les lanières de cuir de couleur.
Clausa : se dit d'une balle qui franchit la ligne de fond adverse; se dit aussi de cette ligne.
Corda : ligne des joueurs d'avant. Ils sont trois.
Cordiers : joueurs d'avant. Celui du milieu porte le nom de tiers.
Crosar : jouer en diagonale.
Dalhar : littéralement « faucher » se dit du joueur qui, par un geste de faucheur, envoie la balle en faute du côté opposé à la main qui joue.
Desclavetat : se dit du tambourin dont la peau cesse d'être tendue par le relâchement des clous ou déchirure des bords de la peau.
Detibat : détendu, se dit d'une peau insuffisamment tendue ou détendue par l'humidité de l'atmosphère
Fanabregon : micocoulier ou alisier sont les arbustes qui fournissent les manches légèrement flexibles des battoirs.
Freta : nom de la muraille qui fermait un des grands côtés du terrain et dont l'action sur les balles était admise à une certaine époque.
Jaça : emplacement marquant l'arrêt d'une balle après son premier bond ; ou son point de sortie du jeu, quand elle ne peut plus être rejouée.
Joc : jeu, nom du terrain; du jeu dans son ensemble. C'est aussi le cri du batteur lorsque, après les balles d'essai auxquelles il a droit, il annonce que la balle qu'il va lancer comptera pour la partie.
Marca : bâton de couleur servant à indiquer l'emplacement d'une jaça.
Marcaire : marqueur, celui qui jalonne les jaçes ou chasses
Pauma : balle
Pelh : désigne ici la peau de chèvre parcheminée
Riban : lanières de cuir rouge, vertes ou bleues servant à cacher les bords de la peau et ornementer le tambourin.
Tambornet : désigne à la fois l'instrument de jeu et le sport qu'il désigne
(Cf. Max Rouquette, ibid).

La "langue" du jeu de balle au tambourin est également porteuse de nombreuses références au monde agricole qui s'expliquent par le contexte principal de pratique de ce sport, et nous renseignent ainsi sur des usages et un vocabulaire aujourd'hui disparus ou peu usités. La transposition de ce vocabulaire vers le français s'est faîte dans le sens d'une transmission du jeu et de ses règles vers les personnes extérieures à ce "milieu" (cf. Guiraud, Christophe. Ibid. P.160). Durant des siècles, le jeu de balle au tambourin n'avait pas présenté de règles réellement uniformisées. Alors que la pratique tend à s’essouffler au cours de la seconde moitié du XXe siècle, le jeu se modifie, se codifie, au gré des rencontres et des échanges avec son voisin transalpin, le tamburello, et grâce à l'action de divers pratiquants et militants du monde occitan.

Une pratique entre tradition et modernité

Le tournant du XXe siècle

Les premières décennies du XXe siècle annoncent un tournant dans la pratique du tambornet. À l'instar de bien des sports traditionnels, le jeu de balle au tambourin va au cours de ce siècle conjuguer entre modernité et traditions, en miroir des évolutions qui touche le monde sportif en général, un monde qui se professionnalise et s'organise autour de fédérations et de clubs.

Naissance des premiers concours et fédérations

Le tambourin d'avant 1914-1918 est encore organisé sur un mode traditionnel. Les premiers concours à audience régionale se mettent en place et sont alors principalement situés dans la vallée de l'Hérault. Le tambornet, jeu populaire pratiqué au cœur de la communauté villageoise sur les grandes places, accompagne alors bien souvent les jours de marché et les fêtes patronales, temps forts de sociabilité comme le confirment des documents d'archives relatifs à cette période pour Montpellier.(Guiraud, C. Ibid. P.240).

Le jeu de tambourin connaît au XXe siècle une très grande popularité, mais demeure encore très peu organisé, ses règles pouvant évoluer d'un village à l'autre. Au cours des premières années du XXe siècle une double dynamique se met en place notamment portée par les membres du Félibrige, conduisant à une plus grande uniformisation des règles et voyant l'apparition de championnats réguliers.

En 1909 naît du côté de Pézenas, un premier concours opposant les équipes des villages alentours. Fautes de règles communes, le tournois se déroule alors dans le respect de celles proposées par l'équipe organisatrice. Les années 1920 sont pour leur part marquées par l'apparition conjointe d'un concours nouveau, initié par le journal royaliste l'Éclair, et d'un premier championnat du Languedoc de jeu de balle au tambourin ouvert aux équipes des concours rivaux. Les rencontres sont largement commentées dans le journal, le sport devenant le support des idées régionalistes de ce média. (cf. Guiraud, C. Ibid. P.124). Parallèlement, et dans ce même contexte de réflexion sur la dimension "méridionale" de ce sport, prend forme une première fédération en 1923, créée par des membres de la bourgeoisie montpelliéraine. La fédération compte à sa naissance dans ses rangs trois félibres : André Pagès, Hyppolite Arnaud et Adrien Fédières. Le sport se codifie, poèmes et chants sont créés sur ce sujet nés de l'implication félibréenne. Mais cette première fédération ne résiste pas à la véritable crise et désaffection qui secoue la pratique du Jeu du Tambourin dans les années 1930 (cf. Max Rouquette. Ibid).

Max Rouquette : porteur d'un renouveau

Un renouveau s'opère toutefois quelques années plus tard, grâce à l'initiative du poète et militant occitan Max Rouquette, originaire d'Argelliers et lui-même joueur passionné de ce sport. L'écrivain prend acte des défauts apparents de ce sport. Il souligne ainsi le manque d'organisation de la pratique, qui, en dépit de la naissance conjointe de différents championnats et d'une première fédération, n'est pas parvenu encore à se structurer. Face aux progrès constant du nombre de licenciés dans les sports collectifs venus d'outre-manche dans la région, Max Rouquette souligne le manque de communication autour du tambourin. Afin de palier à ses insuffisances, naît une seconde fédération en 1938, la Fédération Française du Jeu de Tambourin. Opérations de communication et de diffusion du sport vont au cours des années qui suivirent, se conjuguer avec la rencontre enrichissante du cousin italien, le tamburello.

Les échanges interculturels

C'est au cours d'un voyage transalpin durant l'année 1954, que Max Rouquette prend connaissance du tamburello, jeu de paume italien présentant d'importantes similarités avec le tambornet occitan. Les italiens utilisent dans la pratique de leur sport, un tambourin tendu d'une peau de mulet ayant pour principal avantage de ne pas se déformer par temps humide, au contraire de la peau de chèvre. L'autre particularité du tamburello consiste en sa poignée, alors inexistante sur les tambourins français. La pratique confirme la supériorité et la maniabilité de l'instrument italien, qui s'impose progressivement sur les terrains de jeu français. Les tambourins sont depuis 2005 conçus en France, suite à la création d'une fabrique, LOUJOC, à Balaruc-les-Bains par des étudiants en BTS. Elle s'est depuis installée à Gignac, centre d'accueil de la Tambourithèque, qui dévoile l'histoire du sport.

Ces rencontres entre tamburello et tambornet impulsent une dynamique nouvelle. La pratique elle-même et les règles évoluent de concert pour s'adapter aux usages contemporains. Le synthétique remplace peu à peu la peau de bête. Surtout, les terrains diminuent de taille, accélérant le rythme du jeu; la règle des chasses est abandonnée : le jeu se codifie et s'ouvre à de nouveaux publics. La compétition elle-même voit ses frontières repoussées. Championnats départementaux ou régionaux, cohabitent avec des concours mondiaux voyant s'opposer des joueurs français et italiens, mais également Allemand, Écossais, Brésiliens...au gré des migrations de population et de l'implantation locale de nouvelles équipes séduites par cette forme de jeu de paume (cf. Gilland G. Ibid. P.19).

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Flamenca : roman occitan del sègle XIII
CIRDÒC-Mediatèca occitana
Assié, Benjamin
Bancarel, Gilles
Flamenca est un roman anonyme en vers, composé en occitan, connu par une seule copie manuscrite lacunaire conservée à la Bibliothèque de Carcassonne (auj. Bibliothèque de Carcassonne Agglomération).
 
Le roman de Flamenca est considéré par beaucoup de critiques et historiens de la littérature occitane comme un des plus grands chefs-d’œuvre de la littérature du Moyen Âge, véritable  « joyau de la littérature narrative méridionale et une des plus riches de sens de la littérature nationale d'avant la Renaissance » (Charles Camproux1).
Flamenca a vraisemblablement été composé en Rouergue à la toute fin du XIIIe siècle, période marquée sur le plan littéraire par la décadence de la lyrique occitane des troubadours et sur le plan politique et religieux par le contexte de répression de l’après-Croisade contre les Albigeois.
Le roman s’inscrit dans la tradition narrative du castia gilós (châtiment du jaloux) et fait écho à des œuvres antérieures dont il constitue une vaste amplification narrative : les Nòvas del papagai d’Arnaut de Carcassés et le Castia gilós attribué au troubadour catalan (première moitié du XIIIe siècle).
 
Le roman raconte les tourments que le seigneur Archimbaut (Archambaut, seigneur de Bourbon) fait endurer à son épouse, la jeune et belle Flamenca. Les précautions mises en œuvre par le mari jaloux pour isoler Flamenca des autres hommes vont être à l’origine de son châtiment en provoquant une relation amoureuse entre la dame et le chevalier Guilhem (Guillaume de Nevers). Flamenca, roman de l’adultère, surprend surtout par son histoire, sulfureuse, d’autant qu’il fut composé dans la période de répression idéologique et religieuse que constitue le XIIIe siècle occitan. Afin de conquérir Flamenca, tenue recluse par la jalousie de son mari Archambault, le chevalier Guilhem prend la place d’un clerc pour lui porter, à l’église, de dimanche en dimanche, le message de son amour, détournant le rite du baiser de paix (baiser du psautier). À la suite de nombreuses péripéties, cet amour adultère - voire « hérétique » (René Nelli) - finit par être consommé par les deux amants.

Au-delà de l’intrigue classique du châtiment du mari jaloux qui constitue la trame du récit, le roman est également singulier par la place inédite accordée à l’introspection - certains critiques ont pu parler de « roman psychologique » avant l’heure - et par le souci de vraisemblance historique qui a longtemps créé une confusion entre la date de composition du roman et l’époque dans laquelle l’histoire prend place.
Depuis sa découverte par François Raynouard en 1834, Flamenca ne cesse de fasciner par sa qualité narrative et sa singularité au sein du corpus de la littérature médiévale. Il figure parmi les œuvres occitanes les plus célèbres et traduites dans de nombreuses langues.

Autres versions du titre :

C’est François Raynouard qui, en l’absence des vers liminaires et finaux dans le manuscrit de Carcassonne, forge le titre Flamenca d’après le nom de l’héroïne du roman2. Flamenca est aujourd’hui accepté comme titre uniforme3 conventionnel même si certains critiques ont plaidé pour des variantes possibles permettant de recentrer le roman sur le personnage du chevalier Guillem (A. Limentani, 1965) ou du jaloux châtié, le seigneur Archimbaut (U. Gschwind, 1971).

Formes rejetées :

< La Dame de Bourbon (Mary-Lafon, 1860)

< Las Novas de Guillem de Nivers (Alberto Limentani, 1965)

< Novas de Guillaume de Nevers (Luciana Cocito, 1971)

< Le Roman de Flamenca (Paul Meyer ; Nelly-Lavaud)

< Le Roman d’Archimbaut (Ulrich Gschwind, 1971)

Exemplaires conservés

La seule copie connue du manuscrit a été découverte au début du XIXe siècle dans les collections de la Bibliothèque de Carcassonne.

Localisation actuelle :

Bibliothèque d’agglomération de Carcassonne. Ms. 34 (anciennes cotes : n° 2703 ; n° 2176)

Description matérielle :

Manuscrit sur parchemin, 140 f. Initiales ornées. 215 × 142 mm. Reliure moderne maroquin.

Le manuscrit est incomplet. Outre des lacunes dans le corps même du volume, le premier feuillet est mutilé et les derniers feuillets ont disparu. 

Le manuscrit a été relié avec une lettre autographe de François Raynouard (2 f. à l’entête de l’Institut Royal de France) contenant une « notice sur Flamenca » (Passy-les-Paris, 15 juin 1834).  

La reliure originale en bois a disparu, elle a été remplacée par une reliure moderne (fin XIXe-début du XXe siècle).

Texte de 8095 vers octosyllables sur une seule colonne (29 lignes par page).

La copie serait du début du XIVe siècle, Provence (cour angevine d’Aix).

Provenances :

Anciens possesseurs 

- [Cayrol ?] : sur le fol. 3 r°, en marge du texte, plusieurs occurrences du patronyme « Cayrol » dans une écriture du XVIIe siècle4 qui pourrait signaler un possesseur antérieur aux Murat.

- Collection de Murat : le manuscrit de Flamenca se trouvait dans la bibliothèque de la famille Murat, famille de magistrats carcassonnais sous l’Ancien régime. Les Murat ayant émigré lors de la Révolution française, leurs biens sont confisqués comme biens nationaux en 1792. Le manuscrit de Flamenca avait probablement été acquis par Joseph-Vincent de Murat (1668-1732), érudit et bibliophile5.

- École centrale de Carcassonne (ancien collège des Jésuites) : lors des confiscations révolutionnaires la bibliothèque de la famille de Murat est déposée à l'École centrale de Carcassonne.

- Bibliothèque de Carcassonne : créée en 1804, la Bibliothèque de Carcassonne ne fonctionne vraiment qu’à partir des années 1830. Le manuscrit de Flamenca est signalé en 1834 par Gabriel Delessert préfet de l’Aude6 au philologue François Raynouard7 dans le cadre de la « Commission des travaux littéraires, chargée de surveiller la continuation de la notice des manuscrits, du Recueil des ordonnances des rois de France, et du Recueil des historiens des Gaules et de la France » (Institut de France, Académie des Inscriptions et Belles-Lettres). Celui-ci en publie les premiers extraits dès 18358.

Note d’étude

1. Datations :

L’auteur de Flamenca inscrit son roman dans un désir de vraisemblance historique (précision et cohérence du calendrier liturgique, noms et description de lieux, présence de personnages historiques, etc.). Les premiers critiques de Flamenca ont ainsi considéré que la date de composition devait être contemporaine des événements décrits, considérant Flamenca comme un exemple précoce de roman historique.
En 1937, Georges Millardet propose l’hypothèse d’un roman d’anticipation, considérant qu’il avait été composé antérieurement à  l’année que l’on peut identifier comme celle du récit9.  
Aujourd’hui la majorité des critiques s’accordent sur une composition postérieure à 1234, date où l’on peut situer une partie des références historiques contenues dans le roman même s’ils soulignent les anachronismes assumés par l’auteur.
Alfred Jeanroy10, René Lavaud et René Nelli11 précisèrent la date de composition de Flamenca entre 1240 et 1250, après avoir identifié des emprunts directs au premier Roman de la Rose, composé vers 1230.
François Zufferey dans une édition récente12 place la composition de Flamenca après 1287 en faisant concorder les deux indices principaux relevés par Charles Grimm13 :
- la datation de la composition par l’étude du blason d’Archimbaut, décrit dans la scène du tournoi à Louvain. Le blason des seigneurs de Bourbon ayant connu des évolutions au cours du XIIIe siècle.
- la mention d’une  « mout gloriosa vertut » (« très glorieuse relique » v. 2306) dans l’église de Bourbon. Il pourrait s’agir du fragment de la Vraie Croix et l’épine de la couronne du Christ qui furent transportés à la chapelle castrale de Bourbon en 1287.

Les deux indices (C. Grimm et F. Zufferey) concordent donc pour dater la composition du roman après 1287. « Il s’ensuit que le calendrier de 1234, utilisé dans une perspective symbolique en relation avec la quête amoureuse de Guillaume, et la date de 1249, où disparaît le dernier Archambaut, ne délimitent qu’un vague cadre de vraisemblance historique d’une quinzaine d’années, qui n’exclut pas les anachronismes14 ».

2. L’auteur et le contexte de la composition de l’œuvre :

2-1/  « En Bernardet », auteur de Flamenca ?

Le roman contient un court passage dédicatoire (v. 1722-1736) qui fait l’éloge d’un « seners d’Alga » (seigneur d’Algues) et qui contient la mention d’un certain « En Bernardet » qui pourrait désigner l’auteur de Flamenca.

L’auteur de Flamenca « était un Rouergat dont la langue trouve des échos dans celle du troubadour compatriote Daudé de Prades »15. Au vu de sa très grande connaissance de la littérature d’oc et d’oïl, de sa grande culture biblique et de la maîtrise du calendrier liturgique, l’auteur anonyme a le profil d’un clerc lettré. Pour F. Zufferey, plusieurs indices permettent d’aller plus loin en faisant de l’auteur, « En Bernardet », un ancien clerc ayant renoncé à ses vœux

2-2/ La cour de Roquefeuil, refuge des poètes :

Le roman a vraisemblablement été composé dans l’entourage de la cour de Roquefeuil16. C'est Camille Chabaneau qui identifia le « seigneur d'Alga » au baron de Roquefeuil :  « Alga, château aujourd'hui détruit, mais dont les ruines sont imposantes, était le lieu de la seigneurie de Roquefeuil qui fut le premier comtor de Nant, mais qui, en 1276, ne prenait encore que le titre de seigneur d'Alga17. »

Algues est un château situé près de Nant en Aveyron, dans la vallée de la Dourbie à 34 km de Millau, à proximité de la chaîne de l’Aigoual.

C’est à la famille rouergate des Roquefeuil, issue des seigneurs d’Anduze, alliée aux comtes de Toulouse et aux Trencavel, qu’appartient le personnage de Raymond IV de Roquefeuil, seigneur de Cantobre et d’Algues, comtor de Nant18, d’abord supérieur du couvent des franciscains de Lunel, relevé de ses vœux en 1287 pour se marier. Il est désigné comme le mécène et le protecteur du narrateur de Flamenca qui en loue la prodigalité19.

La cour de Roquefeuil a été célébrée par le troubadour rouergat Daude de Pradas, contemporain de l’auteur de Flamenca, dans le poème  « Ab lo douz temps que renovella / Avec la douce saison qui se renouvelle » :

Lai on es proeza certana,

va salve t’en vai, e no.t trics,

chanssos, que.l seigner t’er abrics

contra la folla gen vilana;

e.ls dos fraires de Rocafuoill,

on fis pretz e jovens s’accuoill,

sapchas a tos ops retener,

si vol en bona cort caber.

(traduction française : Là où se trouve la véritable prouesse, / va chanson vers Sauve20, et ne tarde pas / car le seigneur te protégera / contre la folle gent vilaine ; /et et les deux frères Roquefeuil, / chez qui la vraie valeur et la jeunesse sont bien accueillies, / sache les gagner, / si tu veux trouver place en bonne cour21.)
 

3. La langue de Flamenca :

Pour les critiques et éditeurs de l’œuvre, l’étude de la langue de l’auteur de Flamenca ne laisse aucun doute : l’auteur était rouergat et sa langue a de nombreuses similitudes avec celle du troubadour Daude de Pradas, son contemporain.

Le contexte de réalisation de la copie est également identifiable par certains traits linguistiques attribuables au copiste. Le texte a été copié en Provence, peu après la composition de l’œuvre (tout début du XIVe siècle) comme l’avait suggéré le premier Clovis Brunel22.

Critiques et réception de l’œuvre :  


René Nelli : Flamenca, une œuvre « hérétique » ?

« Si jamais livre a été pourchassé par les autorités religieuses après 1277, c’est certainement le Roman de Flamenca. Il ne doit d’avoir pu paraître qu’au fait qu’il a été écrit avant cette date. Car à partir de la fin XIIIe siècle on constate, dans tous les ouvrages en langue d’oc, la disparition de toutes les théories érotiques incriminées par l’évêque Tempier et combattues par Jean de Mun. L’amour pur adultère devient pêché ; l’amour conjugal seul est exalté, la jeune fille l’emporte sur la dame, etc… Entre 1277 et 1280 la parution d’un roman comme celui de Flamenca eût scandalisé beaucoup plus de gens pieux que le Roman de la Rose ».

René NELLI, Le roman de Flamenca : un art d'aimer occitanien du XIIIe siècle, Toulouse : Institut d'Etudes Occitanes, 1966.

 

Flamenca, la perfection du roman médiéval

« A hundred years after Christien, one of his cleverest pupils wrote de Provençal story of Flamenca, a work in which the form of the novel is completely disengaged from the unnecessary accidents of romance, and reaches a kind of positive and modern clearnesse very much at variance in some respects with popular ideas of what is medieval... Flamenca is the perfection and completion of medieval romance in one kind and in one direction... It is perhaps the first complete modern appropriation of classical exemples in literary art ».

W. P. KER, Epic and Romance. Essays on medieval Literature, London, 1897.

 

Flamenca, somme de l’érotique occitane

« Le roman de Flamenca ne représente pas seulement un intérêt littéraire ; il n’est pas seulement la perle de la poésie narrative du moyen-âge23 ; à sa fiction pleine de fantaisie et riche d’analyses ingénieuses ou profondes, il juxtapose un véritable art d’aimer qui, se développant pour ainsi dire en marge des aventures romanesques, constitue une sorte de somme de l’érotique provençale du XIIIe siècle ».

René NELLI, Le roman de Flamenca : un art d'aimer occitanien du XIIIe siècle, Toulouse : Institut d'Etudes Occitanes, 1966.

« Synthèse de l’érotique et de la poétique troubadouresque, le Roman de Flamenca vient rappeler la dette de la littérature amoureuse occidentale à l’égard de l’Occitanie médiévale ».

Jean-Charles HUCHET, Flamenca, roman occitan du XIIIe siècle, Paris, Union générale d'éditions (10/18), 1989.

Flamenca, roman psychologique

« Flamenca n'est pas un roman historique mais un roman psychologique dont les jeux de comédie ont été rapprochés de ceux de l'École des Femmes ou de Tartuffe. C'est une œuvre célèbre, la plus dense que le Moyen Âge ait produite  ».

J. FABRE DE MORLHON, « Le roman de Flamenca dans son contexte historique » dans :  Mélanges de philologie romane offerts à Charles Camproux, Montpellier : C.E.O. : Université Paul Valéry, 1978.

« Pour l’histoire des sentiments et des mœurs vers l'avènement de Louis IX, le roman de Flamenca est sans contredit, une source incomparable ».

Ch.-V. LANGLOIS, La vie en France au moyen âge de la fin du XIIe au milieu du XIIIe siècle d’après les romans mondains du temps, Paris, 1926-28.

Éditions et traductions

Pour accéder à une bibliographie complète et actualisée sur Flamenca consulter le Trobador (catalogue général de la documentation occitane) : http://lo-trobador.occitanica.eu/cgi-bin/koha/opac-search.pl?idx=&q=flamenca-

1.  Édition du texte occitan et traductions françaises

(1) François-Just-Marie RAYNOUARD, « Notice de Flamenca : poëme provençal, manuscrit de la Bibliothèque municipale de Carcassonne, n° 681 » dans : Notices et extraits des manuscrits de la bibliothèque du Roi et autres bibliothèques, t. 13/2 Paris, 1835-1838, p. 80-132.

Note : Première édition et traduction de quelques extraits de Flamenca, accompagnée de notes et commentaires.

Réédition : Ce texte sera repris intégralement et publié dans : François-Just-Marie RAYNOUARD, Lexique roman ou Dictionnaire de la langue des troubadours comparée avec les autres langues de l'Europe latine : précédé de nouvelles recherches historiques et philologiques, d'un résumé de la grammaire romane, d'un nouveau choix des poésies originales des troubadours, et d'extraits de poëmes divers, Tome premier, Paris : Silvestre, 1838, p. 1-47.

Compte-rendu dans : Amaury-Duval (Eugène-Emmanuel-Amaury Pineu-Duval, dit), « Le Roman de Flamenca » dans : Histoire Littéraire de La France, Paris 1838, T. XIX, 1838, p. 776-78924.

Localiser le document : requête trobador

Consulter en ligne : http://occitanica.eu/omeka/items/show/10824

(2) Jean-Bernard LAFON dit MARY-LAFON, La dame de Bourbon, Paris : Bourdilliat, 1860. xv, 174 p.

Note : Adaptation romanesque et libre de l’oeuvre dans une édition illustrée de dessins romantiques et lithographies de E. Morin gravés par H. Linton.

(3) Paul MEYER, Le roman de Flamenca, Paris : A. Franck ; Béziers : J. Delpech, 1865. 1 vol. (XLV-427 p.).

Note : Première édition complète du roman de Flamenca qui s’accompagne d’une traduction et d’un glossaire et porte un jugement sévère sur l’édition de Mary-Lafon.

L’édition de  Paul Meyer sera très critiquée par Camille Chabaneau (compte-rendu dans la Revue des langues romanes en 187625), qui lui reprochera des erreurs de transcription.

(4) Paul MEYER, Le roman de Flamenca, Paris: Librairie E. Bouillon, 1901.

Note : Deuxième édition de Flamenca entièrement refondue par Paul Meyer, en réponse aux critiques de C. Chabaneau.

Camille Chabaneau reprendra ses critiques à l’encontre de cette nouvelle édition (compte-rendu dans la Revue des langues romanes en 190226).

Réédition : Le roman de Flamenca, publié d'après le manuscrit unique de Carcassonne, traduit et accompagné d'un vocabulaire... par Paul Meyer. [Paris] : [diffusion Champion] ; Genève : Slatkine, 1974.  V-416 p.-[1] f.

(5) René LAVAUD, René NELLI, « Flamenca », dans : Les troubadours [I] : Jaufre, Flamenca, Barlaam et Josaphat, [Bruges] : Desclée de Brouwer, 1960.

Note : L’édition du texte suit celui donné par Paul Meyer, seule la traduction française est nouvelle.

Réédition: Les troubadours : texte et trad. de René Lavaud et René Nelli. Paris : Desclée de Brouwer, 2000 (1127, 1085 p.) (Bibliothèque européenne).

Le 1er tome réunit : « Le roman de Jaufre », « Le roman de Flamenca », « Le roman spirituel de Barlaam et Josaphat ». Texte occitan et trad. française en regard. Reprod. photomécanique de l'éd. de Paris, 1966. Contenu : Vol. 1, L'œuvre épique ; Vol. 2, Le trésor poétique de l'Occitanie.

(6) Ulrich GSCHWIND, Le Roman de Flamenca : nouvelle occitane du 13e siècle, Berne : Francke, 1976. 2 vol. (229, 362 p.). (Romanica helvetica ; 86A-B).

Note : Nouvelle édition du texte en ancien occitan avec de nombreux commentaires ; ne contient pas de traduction.

Edition initiale: Vorstudien zu einer Neuausgabe der Flamenca, Ulrich Gschwind. Zürich : Aku-Fotodruck, 1971. xiii, 553 p ; 23 cm. Has been attributed to Bernardet. Includes index. Diss. : Phil. : Zürich : 1971.

(7) Jean-Charles HUCHET, Flamenca, roman occitan du XIIIe siècle. Texte établi, traduit et présenté par J.-Ch. Huchet, Paris, Union générale d'éditions (10/18), 1989.

(8)  Flamenca : texte édité d'après le manuscrit unique de Carcassonne par François ZUFFEREY et traduit par Valérie FASSEUR. Paris : Le livre de poche, 2014, (Lettres gothiques, 32551).

 

2. Traductions en langues étrangères


Traductions anglaises

W. A. BRADLEY, The Story of Flamenca : The Firts Modern Novel. Arranged form de Provençal Original of the Thirteenth Century. With Woodcuts by Florence Wymans Ivins, Harcourt, Brace and Company (New York), 1922.

Autres éditions :

Flamenca : roman provençal du XIIIe siècle, mis en français moderne par W. et J. BRADLEY ; décoré par Robert Lanz. Paris : G. Crès, 1927.

Flamenca : translated from the thirteenth-century provençal of Bernardet the troubadour, by H.F.M. Prescott.-- London : Constable and Co, 1930.

The Romance of Flamenca : a provençal poem of the 13th century, english verse translation by Merton Jerome Hubert ; revised provençal text by Marion E. Porter. [Princeton] : Princeton University Press, 1962. 1 vol. (456 p.-[4] p. de pl.). Auteur présumé: Bernardet, d'après l'introd. p. 6 et d'après C. Brunel. Bibliogr. p. 449-452. Notes bibliogr. Index

The romance of Flamenca, edited and translated by E.D. Blodgett. New York ; London : Garland, 1995. 443 p. (Garland library of medieval literature ; 101A). Texte en ancien occitan traduction anglaise en regard. Notes bibliogr.


Traductions allemandes

Kurt LEWENT, Bruchstücke des provenzalischen Versromans Flamenca, Halle Niemeyer, 1926 1 vol. (XII-81 p.). (Sammlung romanischer Übungstexte ; 8). Introduction et notes en allemand, texte en ancien provençal. Glossaire.

Flamenca : ein altokzitanischer Liebesroman, übersetzt, mit Einführung, Erläuterungen und Anmerkungen versehen von Fritz Peter Kirsch. Kettwig : Phaidon, 1989. 248 p.  (Erzählungen des Mittelalters ; 2, 516638).

"Ab me trobaras Merce" : Christentum und Anthropologie in drei mittelalterlichen okzitanischen Romanen : Jaufré, Flamenca, Barlaam et Josaphat,  Imre Gábor Majorossy. Berlin : Frank & Timme, cop. 2012. 1 vol. (254 p.) : couv. ill. en coul. ; 21 cm. (Romanistik, ISSN 1860-1995 ; Bd. 10). Bibliogr. p. 243-250. Notes bibliogr.


Traductions italiennes

Giuseppe G. FERRERO, Flamenca, poema narrativo in lingua d’oc, Turin, Gheroni, 1963.

Las novas de Guillem de Nivers : ("Flamenca") introd., scelta et glossario di Alberto Limentani. Padova : Ed. Antenore, 1965. (Vulgares eloquentes ; 1)

Luciana COCITO, Il romanzo di Flamenca, Gênes, Tilgher-Rozzano, 1971.

Flamenca a cura di Mario Mancini. Roma : Carocci editore, 2006. 1 vol. (311 p.) : couv. ill. en coul. ; 18 cm. (Biblioteca medievale ; 106) Texte en ancien provençal avec traduction italienne en regard. Bibliogr. p. [281]-282. Notes bibliogr

Nouveau tirage : 2007, 2010

Flamenca : romanzo occitano del XIII secolo [a cura di] Roberta Manetti. Modena : Mucchi, 2008. (Studi, testi e manuali. Nuova serie ; 11).


Traduction catalane

Antony ROSSELL, El romàn de Flamenca. Novela occitana del siglo XIII, Guadalajara : Ed. Arlequin, 2009.


Traduction espagnole

Jaime COVARSI CARBONERO, El roman de Flamenca, Murcia : Ed.um, 2010.

 

Notes et références

  • 1. Charles CAMPROUX, « FLAMENCA » , Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 16 octobre 2014. URL : http://www.universalis.fr/encyclopedie/flamenca/
  • 2. Note manuscrite introductive de François Raynouard reliée avec le manuscrit original. De Passy, le 15 juin 1834. Voir ci-après.
  • 3. Flamenca [pro] = Flamenca [fre] Verse romance, only a part survives, 13th c. Novas de Guillem de Nivers, Novas de Guillaume de Nevers, Roman de Flamenca, Romance of Flamenca. Anonymous classics a list of uniform headings for European literatures, Second edition revised by the Working group set up by the IFLA, (International Federation of Library Association and Institutions), Standing Committee of the Section on Cataloguing, 2004, p. 151. http://www.ifla.org/files/assets/cataloguing/pubs/anonymous-classics_2004.pdf
  • 4. Flamenca : roman occitan du XIIIe siècle, texte établi, trad. et présenté par Jean-Charles HUCHET. Paris : Union générale d'éditions, 1988 , p.10.
  • 5. Ch. FIERVILLE, « Notice sur la famille de Murat, à propos des nombreux manuscrits qu'elle a transmis à la Bibliothèque », Mémoire de la société des arts et des sciences de Carcassonne, 1870, p. 180-190.
  • 6. Gabriel Delessert (1786-1858), préfet de l’Aude du 12 février 1834 au 27 septembre 1834, avant de devenir préfet d'Eure-et-Loire et préfet de police de Paris.
  • 7. François-Just-Marie Raynouard (1761-1836) fut l’ami et voisin des Delessert à Passy (1805-1836). Léopold MAR, « Raynouard et son temps », Bulletin de la Société historique d'Auteuil et de Passy, N. 10, T.6, 1903, p. 270-274.
  • 8. François-Just-Marie RAYNOUARD, “ « Notice de Flamenca : poëme provençal, manuscrit de la Bibliothèque municipale de Carcassonne, n° 681 » dans : Notices et extraits des manuscrits de la bibliothèque du Roi et autres bibliothèques, t. 13/2 Paris, 1835-1838, p. 80-132. Edition et traduction de quelques extraits.
  • 9. Georges MILLARDET, Le roman de Flamenca, Paris : Boivin et cie, [1937]. 1 vol. (77 p.) ; 22 cm. (Bibliothèque de la revue des cours et conférences), p. 11-12.
  • 10. Alfred JEANROY, Les origines de la poésie lyrique en France au moyen-âge : études de littérature française et comparée suivies de textes inédits par Alfred Jeanroy 4e éd.; Paris : H. Champion, 1969.
  • 11. René LAVAUD, René NELLI, 'Flamenca', 1960 (voir § Editions).
  • 12. Flamenca, texte édité d'après le manuscrit unique de Carcassonne par François ZUFFEREY et traduit par Valérie FASSEUR. Paris : Le livre de poche, 2014.
  • 13. Charles GRIMM, Etude sur le Roman de Flamenca, poème provençal du XIIIe siècle, Paris, Droz, 1930.
  • 14. Flamenca, texte édité d'après le manuscrit unique de Carcassonne par François ZUFFEREY et traduit par Valérie FASSEUR. Paris : Le livre de poche, 2014, (Lettres gothiques, 32551).
  • 15. François ZUFFEREY, op. cit., p. 106.
  • 16. http://www.ludovic-noirie.fr/genealogie/nobles/nant.html
  • 17. Camille CHABANEAU, « Sur le vers 1730 de Flamenca », Revue des langues romanes, T. 32, 1888, p. 103.
  • 18. Le titre de comtor utilisé au XIe siècle signifiait vassal immédiat du comte inférieur au vicomte, mais supérieur aux autres seigneurs. Bulletin de la Société d'agriculture, industrie, sciences et arts du département de la Lozère, T. 7, 1856, p. 338.
  • 19. Flamenca, par François ZUFFEREY, op. cit. p. 106. Sur la famille de Roquefeil, voir : H. de BARAU, Documens historiques, I, 1853, 673-696 ; III, 1857, 773-776 ; Vte de BONALD, Documens généalogiques, 1902, 254-277 ; 442-444 ; A.F. de GAUJAL, Etudes historiques sur le Rouergue, Paris, 1859, T. IV, p. 31-36.
  • 20. Sur les seigneurs de Sauve: http://www.ludovic-noirie.fr/genealogie/nobles/anduze.html
  • 21. Poésies de Daude de Pradas, introd., trad. et notes par A. H. SCHUTZ. Toulouse : Privat ; Paris : H. Didier, 1933. (Bibliothèque méridionale, 1ère Série ; t. 22). p. 1-5..
  • 22. Clovis BRUNEL, Bibliographie des manuscrits littéraires en ancien provençal, Paris, 1935, p. 26.
  • 23. Jules ANGLADE, Histoire sommaire de la littérature méridionale au moyen-âge (des origines à la fin du XVe siècle), Paris, de Boccard, 1921, p. 143.
  • 24. https://archive.org/stream/histoirelittra19riveuoft#page/786/mode/2up
  • 25. Camille CHABANEAU, « Notes critiques sur quelques textes provençaux. Le Roman de Flamenca », Revue des Langues Romanes, IX, 1876, p. 24-259.
  • 26. Camille CHABANEAU, « Une nouvelle édition du Roman de Flamenca », Revue des langues romanes, T. 5, 1902, p. 5-43.

Ressources numériques

> Vidéoguide : Le roman de Flamenca / CIRDÒC Mediatèca occitana

> Cèrqui una edicion de l'òbra medievala "Flamenca" [Question / Réponse]

> Flamenca : Cap d'òbra occitan del sègle XIII / Lo CIRDÒC Tèma(s)

> Flamenca : Lo cap d'òbra desconegut / [Exposition virtuelle réalisée par le CIRDÒC - Mediatèca occitana]

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Description du fonds

“Papiers de Henri GRÉGOIRE, curé d'Embermesnil, depuis évêque de Blois, sur les patois de la France.”

Recueil factice de 121 f. manuscrits contenant une partie des réponses à la circulaire de l’abbé Grégoire sur les “patois” et de nombreuses pièces en langue de France envoyées avec les réponses, notamment la pièce « Jammeto et Ramoun”, comédie en six actes, en occitan, très populaire dans la région de Carcassonne au XVIIIe siècle.

Ce recueil de manuscrits complète la documentation sur l’enquête Grégoire conservée à la Bibliothèque de la Société de Port-Royal (REV 222 et 223). Il était inconnu d’Augustin Gazier, qui publia à partir de 1874 dans la Revue des langues romanes les matériaux rassemblés par l’enquête Grégoire : RLR. t. V, 1874 ; articles rassemblés en monographie : Augustin Louis GAZIER, Lettres à Grégoire sur les patois de France, 1790-1794 : documents inédits sur la langue, les moeurs et l’état des esprits dans les diverses régions de la France au début de la Révolution ; suivi du Rapport de Grégoire à la Convention… Paris : A. Durand et Pedone-Lauriel, 1880 (reprint : Genève : Slatkine, 1969).

 

 

 

 

 

 

Dates extrêmes :

 

Langues représentées dans le fonds :

 

 

Importance matérielle :

 

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Bibliothèque de la Société de Port-Royal. Paris - Abbé Henri Grégoire : Enquête sur les patois (1790-1794)
Bibliothèque de la Société de Port-Royal. Paris
Centre inter-régional de développement de l'occitan (Béziers, Hérault)

Histoire du fonds

La bibliothèque de la Société de Port-Royal est une bibliothèque privée spécialisée dans l’histoire religieuse de la France moderne. La collection est constituée au cours du XVIIIe siècle par des fidèles du jansénisme. Passée de mains en mains, la collection est vendue et dispersée à la Révolution. C’est en 1802 qu’une société est fondée pour faire vivre le patrimoine et le souvenir du jansénisme et de Port-Royal des Champs. L’important fonds de livres et de manuscrits provenant de la collection de l’abbé Henri Grégoire a été transmis par son secrétaire, l’abbé Jean-Louis Rondeau puis par Gabriel Girard, prêtre de la paroisse Saint-Séverin. La Société Saint-Augustin, ancêtre de la Société de Port-Royal l'a reçu en 1840.

Le fonds de l’abbé Henri Grégoire conservé à la Bibliothèque de la Société de Port-Royal rassemble des imprimés et des manuscrits provenant de l'abbé révolutionnaire et représente une importante documentation sur la Révolution française. Les manuscrits du fonds Grégoire comprennent de nombreuses correspondances reçues par l’abbé Grégoire pendant la Révolution, dont une partie concerne l’Enquête sur les patois de 1790-1794, première grande enquête menée en France sur la situation sociolinguistique.

Modalités d'entrée :

Legs

Accroissement :

Fonds ouvert (le fonds s’accroît régulièrement de documents sur la Révolution française)

Description du fonds

La Bibliothèque de la Société de Port-Royal conserve une grande partie des matériaux produits par l’enquête de l’abbé Henri Grégoire sur les « patois » entre 1790 et 1794. L’autre partie est conservée à la Bibliothèque nationale de France (BnF- Dpt des manuscrits - NAF 27981). Contenu :

- Ms. REV 222 : recueil factice contenant les réponses à la circulaire de l’abbé Grégoire.

- Ms. REV 223 : recueil factice contenant des pièces imprimées en « patois » envoyées à Grégoire en même temps que les réponses à la circulaire.

La plupart des documents réunis dans ces deux recueils ont été publiés par Augustin Gazier dans la Revue des langues romanes à partir de 1874 (t. V) puis en monographie : Augustin Louis GAZIER, Lettres à Grégoire sur les patois de France, 1790-1794 : documents inédits sur la langue, les mœurs et l’état des esprits dans les diverses régions de la France au début de la Révolution ; suivi du Rapport de Grégoire à la Convention… Paris : A. Durand et Pedone-Lauriel, 1880 (reprint : Genève : Slatkine, 1969). En revanche, Augustin Gazier n’avait pas connaissance du recueil BnF-NAF 2798, resté inédit.

Dates extrêmes :

- réponses à l'enquête de l'abbé Grégoire : 1790-an III

- pièces justificatives : 1687-an II

Langues représentées dans le fonds :

français, alsacien, basque, breton, occitan (tous dialectes), dialectes de langue d'oïl (berrichon, bourguignon-morvandiau, franc-comtois, picard, poitevin-saintongeais, wallon)

Importance matérielle :

2 recueils factices : 100 + 22 ms.

Supports représentés :

Manuscrits, imprimés

Pour le consulter

Identifiant du fonds :

Ms. REV

Instruments de recherche disponibles :

Sur le site de la bibliothèque

Répertoire national des bibliothèques et fonds documentaires (RNBFD)

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Médiathèque de la Communauté d'agglomération de Carcassonne. Fonds occitans.
Centre inter-régional de développement de l'occitan (Béziers, Hérault)

Présentation de l’établissement

La Bibliothèque de Carcassonne - aujourd’hui Réseau de lecture publique de Carcassonne agglomération - est créée en 1804 pour accueillir les fonds de livres et manuscrits issus de la nationalisation des biens du clergé - bibliothèques de l'abbaye de Lagrasse, des couvents des Jacobins, des Carmes et des Capucins de Carcassonne - et des familles nobles émigrées, en particulier l’importante bibliothèque de la famille de Murat, magistrats carcassonnais.
Ce n’est qu’à partir des années 1830 que la Bibliothèque de Carcassonne commence à fonctionner véritablement, entamant l’inventaire de ses collections. Il faut attendre 1834 pour que le manuscrit de Flamenca (ms. 34 de la Bibliothèque de Carcassonne), copie unique d’un chef-d’œuvre occitan du XIIIe siècle, provenant de la collection de Murat, soit découvert et signalé à François Raynouard qui le publie pour la première fois en 1835.

Descriptions des fonds :

La Bibliothèque de Carcassonne conserve une importante documentation occitane au sein du fonds des manuscrits, mais aussi au sein de ses fonds régional et musical.

Manuscrits occitans :

Le fonds général des manuscrits de la Bibliothèque de Carcassonne contient une dizaine de manuscrits en occitan, dont le très célèbre manuscrit de Flamenca. La plupart des manuscrits sont liés aux écrivains et personnalités de l’Aude engagés dans les mouvements de renaissance occitane à partir du milieu du XIXe siècle : Achille Mir (ms. 91, ms. 49, ms. 24190 ; ms. 36284), Gaston Jourdanne (ms. 45, 24352, 26155, 14779) et les animateurs de la revue La Tèrra d’Oc, en particulier Louis Alibert et Paul Albarel (ms OC TER : « Tèrra d’Oc »).
Signalons également un recueil de « Poésies patoises » de l’abbé Philippe Samary, député du Clergé aux États généraux (ms. 155) et le recueil de « chants d’église [traduits] en patois », œuvre d’Antoine Nérie (1745-1824), curé d’Alzonne, qui traduisit en occitan les chants liturgiques à destination des paroissiens audois et dont le recueil connut cinq éditions entre 1820 et 1827 (ms. 27).

Documentation régionale :

La Bibliothèque de Carcassonne possède une importante documentation occitane moderne et contemporaine au sein de son fonds régional et d’un fonds occitan, régulièrement enrichie. Le fonds régional s’est développé à partir de l’acquisition au début du XXe siècle de la bibliothèque de Gaston Jourdanne (1858-1905), maire de Carcassonne, avocat et journaliste, érudit et historien du Félibrige. Il rassembla de son vivant une importante bibliothèque sur l'histoire de Carcassonne et de sa région.
Le fonds régional de la Bibliothèque de Carcassonne est particulièrement riche sur les écrivains audois, comme Joë Bousquet, Gaston Bonheur ou encore René Nelli.

Dates extrêmes :

XIIIe - XXIe siècle

Langues représentées dans le fonds :

français, occitan (languedocien)

Importance matérielle :

12 ms. , env. 500 imprimés (monographies, périodiques) et enregistrements sonores

Supports représentés :

manuscrits, monographies imprimées, périodiques, musique imprimée (partitions), musique enregistrée (CD)

Accroissement :

fonds ouvert

Modalités d’entrée :

achat, dons, legs

Pour le consulter

Identifiant du fonds (cotes extrêmes) :

F.Rég (Fonds régional), OC (fonds occitan contemporain), Ms. (Fonds général des manuscrits)

Instruments de recherche disponibles :

- Fonds régional : Catalogue en ligne du réseau de lecture publique de Carcassonne agglomération : http://catalogue.carcassonne-agglo.fr
- Manuscrits : Catalogue général des manuscrits des bibliothèques publiques de France. Départements — Tome XIII. Carcassonne. Consultable en ligne : http://ccfr.bnf.fr/portailccfr/jsp/index_view_direct_anonymous.jsp?record=eadcgm:EADI:FRCGMBPF-110696201-01a.xml

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Les parlers de France. Dans : Revue des patois gallo-romans. T2 (1888) / Gaston Paris
Paris, Gaston (1839-1903)
La conférence sur "Les parlers de France" du philologue Gaston Paris a eu une très grande influence sur la linguistique en France au tournant du XXe siècle, en particulier sur le projet d'Atlas linguistique de la France de Jules Gillieron. 
"Gaston Paris, romaniste, professeur au Collège de France et futur académicien, nie l'existence même de la langue d'oc, en prônant une continuité entre les divers « parlers » présents sur le territoire français, à tel point d'ailleurs, qu'on a longtemps placé l'occitan dans la famille des langues gallo-romanes, sans s'interroger sur les liens de parenté étroits qui pouvaient exister entre l'occitan et le catalan, ce dernier ayant été classé dans le domaine hispano-roman. Ce discours de Gaston Paris qui tente de convaincre qu'il existe une adéquation naturelle entre les parlers de France et ses frontières physiques est assez représentatif des positions des représentants officiels de la linguistique française d'une part, et d'autre part de ce que peut être la négation du travail des érudits provinciaux." (source : L'occitan : une langue, une histoire, une littérature, Université Paul-Valéry Montpellier-III, UOH)

Accéder à l'article "Les parlers de France" dans Gallica (bnf.gallica.fr) : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k92984n/f161
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La dialectologie : Aperçu historique et méthodes d'enquêtes linguistiques / Sever Pop
Pop, Sever (1901-1961)
Sever POP (1901-1961) est un linguistique roumain, spécialiste de la dialectologie et de la géographie linguistique.

En 1950, il publie cet ouvrage de synthèse qui demeure une des rares histoire générale et complète des enquêtes linguistiques et études dialectologiques.

Cet ouvrage fait une grande place aux enquêtes linguistiques et travaux dialectologiques en France de la Révolution jusqu'au XXe siècle et en particulier sur les travaux concernant la langue occitane. 

La Dialectologie : aperçu historique et méthodes d'enquêtes linguistiques représente un manuel accessible sur l'histoire de la dialectologie, l'évolution des méthodes d'enquête mais aussi sur les représentations des élites et des institutions concernant les langues minorisées en Europe. 

>> Accéder au document  sur Archive.org
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Trobairitz en Gevaudan
Centre inter-régional de développement de l'occitan (Béziers, Hérault)

L'Occitanie accueille au XIIe et XIIIe siècles, un renouveau littéraire initié par le duc d'Aquitaine et premier troubadour, Guillaume IX de Poitiers. Cet art du trobar, acquiert progressivement, et en langue d'oc, ses lettres de noblesse. Trobadors et trobairitz, leurs consœurs, chantent durant ces deux siècles qui constituent l'âge d'or de cette lyrique, fin'amor, joi et joven (amour raffiné, joie d'amour et jeunesse).

 

I/ Lozère, terre de Trobar

Le souvenir de ces poètes médiévaux est parvenu jusqu'à nous grâce à un ensemble de textes, appelés chansonniers, dont les principaux intitulés H et W sont respectivement conservés au Vatican (Rome) et à la Bibliothèque nationale de France (Paris). On conserve également des Vidas e Razòs, courts textes biographiques accompagnant les poésies et qui donnent quelques éclaircissements sur l'origine et l'existence de leurs auteurs. Ces écrits dressent la liste de pas moins de 2500 troubadours et d'une vingtaine de trobairitz.

Terre occitane, le Gévaudan est également terre de troubadours et de trobairitz. Ces mêmes sources évoquent pour ce seul territoire - dont les contours dépassent aujourd'hui le département administratif de la Lozère en débordant également sur l'Ardèche ou le Gard -, un ensemble d'au moins quatorze troubadours dont quatre femmes, se répartissant autour de 1180, en deux fécondes générations d'écrivains. Garin le Brun, Guillem Gasmar, Grimoart Gausmar, Garin d'Apcher ou Torcafol, débutent leur création alors que e courant ouvert par le poitevin Guillaume IX, duc d'Aquitaine, est déjà bien établi. Leur production témoigne de l'accomplissement rencontré par cette littérature.

Au regard de l'abondante œuvre laissée par leurs confrères masculins, les quelques chansons écrites par des trobairitz gévaudanaises semblent un bien maigre ensemble. Elles n'en demeurent pas moins un témoignage d'exception quant à la place des femmes de ce temps et de cette aire, l'Occitanie. Notons d'ailleurs l'importance, comparativement à l'ensemble d'une vingtaine de noms connus seulement pour tout le monde occitan, des trobairitz du Gévaudan, au nombre de quatre.

 

II/ Voix de femmes en Occitanie

Contrairement à la prose des troubadours, celle des trobairitz, quantitativement moindre il est vrai face à un ensemble de plus de deux mille voix, fut longtemps reléguée au second plan. Le tournant des années 1970, à la faveur des différents mouvements féministes, puis les analystes contemporains ont permis de revenir sur ce pan de la lyrique troubadouresque, d'en étudier les particularités, l'origine de leurs auteurs... définir dans les faits s'il existe une voix féminine du trobar différente d'une langue que l'on pourrait dire "masculine".

Le portrait général des femmes que dressent les biographies des Vidas, est assez succinct. Rédigés bien souvent de façon postérieure à la mort de leurs sujets, ils sont dans le cas des trobairitz limités à quelques lignes, quand ces dames ne figurent pas uniquement dans la Vida oula Razò d'un troubadour qui fut l'un de leurs proches ou avec lequel elles dialoguèrent. A travers les vingt portraits de femmes connus, un portrait-type, que des sources nouvelles pourraient conduire à modifier, semble se dégager. Les femmes prenant la plume, furent principalement de noble extraction. En dépit d'une situation relativement privilégiées en Occitanie, espace qui leur accorde un certain nombre de droits, tel celui d'hériter, il est à noter que ces poétesses s'expriment en un temps, le Haut Moyen Âge, qui demeure peu favorable à la gent féminine. Avoir la possibilité de coucher sur le papier leurs idées et leurs « amours », puisque tel est le principal sujet de débat, demeure le fait d'une poignée de femmes socialement favorisées. Les thèmes qu'elles abordent sont communs à leurs homologues masculins : fin'amorjoi et joven y trouvent ainsi une place de choix, avec peut-être un regard et surtout, une posture dans l'échange amoureux, quelque peu différents.

 

III/ Voix de femmes en Lozère

  • Voix de femmes en Lozère

     

Hasard des sources ou véritable symbole d'une situation particulière à cet espace, le Gévaudan accueillit un quart des trobairitz répertoriées à ce jour, la plupart d'entre elles appartenant par ailleurs à la seconde génération des troubadours gévaudanais. La prudence demeure de mise face à cette production vieille de plusieurs siècles, et pour cela soumise aux aléas du temps et de la destruction. Ces trobairitz gévaudanaises sont donc au nombre de quatre : Almucs de Castelnou ou Almoïs de Châteauneuf (selon les commentateurs), Iseut de Chapieu ou Iseu de Captio, Azalaïs d'Altier et Na Castelloza, cette dernière s'installant en Gévaudan après son mariage.

Moins connues que leurs homologues masculins, dont Perdigon, auteur originaire de Lespéron, aux environs de Langogne (aujourd'hui administrativement située en Ardèche), ou Garin d'Apchier ; nous savons en définitive peu de choses des trobairitz de cette zone, dont peu de pièces et de maigres biographies constituent les uniques traces. Laissons de côté Azalaïs d'Altier, demoiselle issue de la noble famille du même nom et connue par son salut à Clara d'Anduze, pour étudier plus en détails ses trois comparses, très vraisemblablement contemporaines comme le suggèrent leurs écrits.

 

  • Almoïs de Châteauneuf et Iseut de Chapieu

Almoïs de Châteauneuf et Iseut de Chapieu sont principalement connues du fait des échanges épistolaires qu'elles entretinrent. Toutes deux sont originaires d'une région voisine.

Almoïs de Châteauneuf serait en effet issue de la famille de Châteauneuf-Randon, résidant dans le captium du même nom à quelques kilomètres de Langogne sur la route en direction de Mende, un château rendu célèbre par le chevalier Du-Guesclin mort à cet endroit. Nous la connaissons principalement par une courte biographie présentée dans le chansonnier H conservé au Vatican à Rome. Un acte d'hommage datant de 1219 et relatif au seigneur de Châteauneuf, le dénommé Guillaume, indique que la mère de celui-ci portait le nom d'Almoïs. Clovis Brunel et avec lui d'autres historiens, on fait depuis le rapprochement entre la trobairitz et la noble dame. (cf. TREMOLET DE VILLERS, Anne. Trobar en Gévaudan. Mende, Association du Festival de Mende, 1982. Pp.67-70, et BRUNEL, Clovis. « Almois de Châteauneuf et Iseut de Chapieu », Extrait des Annales du Midi, t.XXVIII, Toulouse, 1916).

Iseut de Chapiu ou Iseu de Captio. Les commentateurs voient en elle une dame de Chapieu, du nom d'un château situé alors sur le Causse de Mende et aujourd'hui en ruines. Trobairitz de la seconde génération également, elle aurait produit ses pièces entre 1187 et 1250 environ.

Dans le cadre de la tenson qui les réunit ( tenson = dialogue poétique), Iseut de Chapieu endosse le rôle de médiatrice entre Almoïs et son amant, dénommé Guigue de Torna ou de Tournel en fonction des commentateurs et qui fut peut-être, un parent de la demoiselle de Chapieu. Les seigneurs de Tournel portèrent en effet successivement les titres de Villaforti (de Villefort), de Capione (de Chapieu), leur préférant à compter du XIIIe siècle celui de Tornello (Tournel). (cf. Clovis Brunel, ibid.).

Le dialogue ouvert par Iseut se compose d'une seule cobla (couplet), précédée d'une Razò, fragments épars d'une œuvre possiblement plus vaste mais désormais perdue. Iseut prend la défense du sieur Guigue, accusé par sa maîtresse de trahison. Les échanges par leur tonalité suggèrent une proximité entre les deux femmes qui dépasse le simple échange épistolaire. Le langage s'y fait plus direct, le ton et le style en sont quoi qu'il en soit riches et soutenus.

Toute question demandant réponse, Almoïs prend à son tour sa plume afin de justifier sa position face à cet amant rejeté. Son couplet nous révèle un peu plus l'histoire amoureuse qui se trame derrière ces quelques lignes. Elle y engage son amant à demander pardon d'une faute, la tromperie, particulièrement mal perçue par la société occitane de l'époque. Nous ne possédons de cette dame qu'une œuvre unique, insuffisante pour connaître la finalité de cette médiation.



  • Na Castelloza

La vie et l’œuvre de Na Castelloza, originaire d'Auvergne, est dans les faits liée au Gévaudan et à ses poétesses qui furent ses contemporaines et ses interlocutrices. Dans « Ja de chantar non degr'aver talan », elle entame ainsi un dialogue avec une « Dompna N'Almueis », qui ne serait autre que la dame de Châteauneuf.

Mariée à Turc de Mairona, de Meyronne en Gévaudan (Haute-Loire), Na Castelloza a laissé à la postérité au moins trois écrits. Contrairement à la position de la Domna, dominatrice et indépendante, adoptée notamment par Almoïs de Châteauneuf, elle laisse pour sa part le portrait d'une dame soumise et implorante vis-à-vis de son amant. 

La littérature médiévale en Gévaudan fut comme ailleurs en Occitanie, particulièrement florissante durant l'âge d'or du Trobar. De ces troubadours demeurent quelques images, chansons et des noms, liés aux domaines de ces seigneurs et poètes.

 

 

BIBLIOGRAPHIE

Petite anthologie des écrivains lozériens de langue d'oc. [Mende] : s.n., impr.1982.

ANATOLE, Christian, "Las trobairitz" in Lo Gai Saber n°394, avril 1979.

BEC, Pierre, Chants d'amour des femmes-troubadours. Paris, Stock, 1995.

BOGIN, Meg. Les femmes troubadours. Paris, Denoël/Gonthier, 1978.

BRUNEL, Clovis. « Almois de Châteauneuf et Iseut de Chapieu », Extrait des Annales du Midi, t.XXVIII, Toulouse, 1916.

GIRAUDON , Liliane, ROUBAUD, Jacques. Les Trobairitz. Les femmes dans la lyrique occitane. Paris,Action poétique, 1978.

LAFONT, Robert ; ANATOLE, Christian, Nouvelle histoire de la littérature occitane, Paris, P.U.F. 1970.

NELLI, René, Ecrivains anticonformistes du moyen-âge occitan. La femme et l'Amour. Anthologie bilingue, Paris, Phébus, 1977.

REMIZE, Félix. Biographies lozériennes : les noms célébres du pays de Gévaudan. Le Coteau-Roanne, Horvath, 1989.

SOUTOU, A. « L'enracinement des troubadours : Bertran de Marseille et le terroir de Ste-Enimie (Lozère » in Annales de l'Institut d'études occitanes 0180-4200 ; N° 18, 1954. Pp. 29-33.

TREMOLET DE VILLERS, Anne. Trobar en Gévaudan. Mende, Association du Festival de Mende, 1982.

VASCHALDE, Henry. Histoire des troubadours du Vivarais et du Gévaudan. Paris, Maisonneuve et Ch. Leclerc, 1889.

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Gargantua
CIRDÒC-Mediatèca occitana

Gargantua es aqueste eròi gigantàs e legendari, que percorreguèt França al fial de las cronicas e que Rabelais se n'inspirèt per crear lo personatge de sos recits literaris (La vie très horrifique du grand Gargantua, père de Pantagruel, jadis composée par M. Alcofribas abstracteur de quintessence. Livre plein de Pantagruélisme, 1534).

1/ La legenda conta que...

Aqueste personatge mitic a de caracteristicas que lo rendon aisidament identificable, e que se sarran de las d'una autra figura « d'òme salvatge », Joan de l'ors. Aquestes gigants an un brave apetís e una barba druda. Gargantua se fa tanben remarcar per sa maladreça e son caractèr barrutlaire. La legenda vòl qu'aja percorregut lo campèstre, transformant lo païsatge sus son passatge al fial de sos repaisses (e de sas dejeccions), de sòbras laissadas per sas bòtas, de calhaus escampats per jòc... Li arriba quitament d'agotar de ribièras quand a set ! Aquel apetís insadolable illustrariá l'apetís que marca lo periòde seguent las dificultats de la pèsta e de la guèrra de Cent Ans (fin del sègle XV, debuta del sègle XVI). Malbiaissut, mas pas jamai marrit intencionalament, Gargantua es un eròi popular, un golarut que sas aventuras, de còps escatologicas, fan rire lo grand public de l'epòca. Los recits legendaris sus sa naissença dison que seriá nascut de personas de talha inferiora a la mejana e que, al contrari, el, auriá conegut un creis plan important. Per çò qu'es de Rabelais, afortís que son personatge de Gargantua seriá nascut un tres de febrièr (e d'autres autors o pensan tanben) en sortissent de l'aurelha esquèrra de sa maire. Aquesta data de naissença e son caractèr absurde lo sarran de l'esperit carnavalesc que los recits ne son embugats e que ne partejan ja la foncion catartica.

2/ Istoric de las practicas, fòcus sus Langonha.

Se la vila s'atribuís Gargantua coma eròi fondator, en se basant segurament suls prepausses de Felix Viallet, aquò's degut en part a un episòdi legendari que s'i seriá debanat. Fach pro rar, lo sang de Gargantua i auriá rajat, en seguida d'una nafradura al det, colorant aital las tèrras a l'entorn. Mas cal pas doblidar que Langonha, a la fin del sègle XV, es una vila situada a la crosada dels camins de comèrci, amb una fièra famosa e atractiva. Aital, recep aquesta literatura de còlportatge que Gargantua n'es un dels « best-sellers ». Cal pasmens esperar lo sègle XIX per veire aparéisser lo cap gigant de Gargantua que las cartas postalas ancianas de Langonha ne perpetuan lo sovenir. Aqueste es mostrat dins l'encastre del cortègi de carris florits que desfilan per la ciutat. Un cap monumental, que mesura mai o mens tres mètres cinquanta. Amai, es articulat, sos uèlhs e sa boca semblan prene vida e convidar los estajants a la fèsta. Mas doblidem pas que Gargantua es pas l'eròi d'una region en particular, tant los recits de còlportatge li fan percórrer e transformar los païsatges de França.

3/ Las practicas actualas a l'entorn de Gargantua.

Amai siá eissida d'una literatura en màger part orala, la legenda de Gargantua contunha de viure encara a l'ora d'ara. Aquò's lo cas, per exemple, en Losera, dins la vila de Langonha (« Lo país de Gargantua ») que i festejan lo gigant dempuèi 1884. E se las sortidas de « Gargantua » del 1èr d'agost s'arrestèron a l'entorn de 1978, son cap tornèt sortir un primièr còp en 2000, e dempuèi, torna participar als passa-carrièras de carris carnavalescs. Se remarca tanben a Langonha la creacion recenta de la confrariá del Manouls Langonais de Gargantua, que met en lum aquesta especialitat culinària de tombadas de moton e de vedèl (los manols) mas tanben la confisariá sonada « La Gargantille ». E dempuèi lo 7 d'abril de 2000, Langonha ten lo recòrd del mond de la salsissa la mai longa : 23 160 m tot bèl just. Un còp de mai en omenatge a Gargantua.

4/ La transmission d'ièr e d'uèi.

Los primièrs recits de literatura orala sus la figura de Gargantua e dels gigants en general espelisson en França a partir de l'Edat Mejana, per conéisser fin finala una capitada bèla al sègle XVI. Creis lo nombre de cronicas oralas, tan coma aquel dels obratges escriches, a la seguida de Rabelais. En 1675, pareisson aital Les Chroniques du Roy Gargantua, cousin du très redouté Gallimassue e en 1715, es publicada la Vie du fameux Gargantua, fils de Briarée et de Gargantine. D'uèi, la legenda de Gargantua se transmet d'un biais diferent, en acòrd amb las modalitats actualas de partatge de las coneissenças. Se trapan aital de sites internet que li son dedicats, e existís quitament sus Facebook un #Gargantua.

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