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Manifeste « Mon país escorjat » (Mon pays écorché)
Lafont, Robert (1923-2009)
Maffre-Baugé, Emmanuel (1921-2007)
Chabrol, Jean-Pierre (1925-2001)
Le manifeste Mon païs escorjat est paru en 1979, dans le numéro 2 de la revue occitaniste Aici e ara. Il est publié à nouveau quatre ans plus tard comme supplément du numéro 4 de la même revue, sous la forme d’une affiche bilingue (français-occitan).
Le manifeste est signé de trois noms : Robert Lafont, Jean-Pierre Chabrol et Emmanuel Maffre-Baugé, ainsi que « 10 000 autres signataires ».
Emmanuel Maffre-Baugé (1921-2007) est une figure du syndicalisme viticole héraultais, député européen de 1979 à 1989, par ailleurs petit-fils du félibre Achille Maffre de Baugé, de Marseillan. Sympathisant communiste, Maffre-Baugé s’illustre dans la défense des revendications des vignerons languedociens dans les années 1970, notamment dans leur lutte contre l’entrée dans l’Union européenne de l’Espagne, de la Grèce et du Portugal, concurrents directs des viticulteurs et fruiticulteurs occitans.
Le manifeste porte également les noms du cinéaste Jean-Pierre Chabrol (1925-2001), originaire des Cévennes gardoises, également figure du Parti communiste, et de l’universitaire, écrivain et poète Robert Lafont (1923-2009), figure de la décentralisation et de la reconnaissance politique et culturelle de la langue et de la culture occitanes.
Dans l’ouvrage de Jean-Claude Bouvier et Jean-Noël Pelen Récits d’Occitanie est publiée la réponse donnée par Robert Lafont à l'article d'un autre universitaire montpelliérain, Jean-Marie Guillon. Robert Lafont y affirme être le premier auteur de Mon païs escorjat, qu’il aurait écrit à Heidelberg avant de le soumettre à Maffre-Baugé et Jean-Pierre Chabrol, le syndicaliste héraultais lui disant « On va le faire signer ».
Le texte a pour thème principal le refus par ses auteurs de l’intégration de l’Espagne, du Portugal et de la Grèce dans le Marché commun, pour des raisons économiques. Selon eux, cette triple incorporation entraînerait une concurrence déloyale avec les agriculteurs des pays d’oc, dans les domaines viticoles, de la production de fruits et légumes (fraises, pêches, abricots, tomates) ainsi que de l’élevage ovin. Maffre-Baugé y voit, ainsi qu’il le développe dans l’interview qu’il accorde à Jean-Pierre Laval pour Aicí e ara, une stratégie des “grands lobbies”, comprendre des entreprises de la grande distribution qui, associés à l’état centraliste, vont saigner l’économie des régions occitanes. Au discours économiste vis à vis du Marché commun vient donc s’adjoindre un discours régionaliste aux relents séparatistes : ce serait l’économie de l’Occitanie, pensée en tant que territoire propre,  que la France, poursuivant une logique de destruction, et les “multinationales”, envisageraient de détruire.
D’un autre côté, dans un propos d’ouverture culturelle, les signataires précisent - tout comme Maffre-Baugé dans son article - que ce rejet est purement économique et qu’ils ne seraient en aucun cas opposés à une Europe “des peuples”, une construction européenne basée sur le rapprochement des cultures, et notamment des « pays frères », mais que tel n’est pas le projet réel de cet élargissement du Marché commun. Le propos occitaniste transparaît avec la mention explicite d’une Occitanie en pleine renaissance culturelle, terre de combats sociaux et émancipateurs, convoquant les Cathares, les Camisards et enfin les Maquisards de la Deuxième guerre mondiale.
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Le récit occitan de L’Humanité  : réponse à Jean-Marie Guillon / Robert Lafont
Lafont, Robert (1923-2009)
Robert Lafont répond à l'article de Jean-Marie Guillon : De Maurin des Maures à Maffre-Baugé : le récit occitan de L'Humanité.

Robert Lafont énumère les différents évènements politico-économiques des années 1960 à 1980 sur le territoire occitan, de la grève de Decazeville en 1962-63 jusqu'à la manifestation du 10 mai 1980 à Montpellier.  Il explique la position du parti Communiste avant de conclure sur le thème de l'autogestion en rappelant que «
Le Larzac, c’est le point essentiel de notre siècle. »

Ce texte est la transcription, relue par Robert Lafont, de son intervention orale. Il est disponible sur le site OpenEdition Books

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« Sens » et littérature à l'origine de l'Europe moderne / Robert Lafont
Lafont, Robert (1923-2009)
Article de Robert Lafont publié dans la revue Littérature en 1989, numéro thématique : Le partage culturel inégal et son texte.

Lire l'article (en français) en ligne sur Persée. 
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« Lo sol poder es que de dire » : Robert Lafont dit le poème « La lenga d'òc »
Lafont, Robert (1923-2009)
Robert Lafont (1923-2009) est incontestablement, par son œuvre et son action, un acteur majeur de la modernité occitane. Il l'est comme chercheur et comme enseignant, comme homme d'action et comme chef de file de mouvements, comme intellectuel autant que comme écrivain.   
Sur le plan littéraire, son œuvre en prose et son théâtre ont représenté des étapes de reconquêtes d'espaces littéraires et de capacités linguistiques structurantes pour la langue occitane contemporaine. Pourtant Robert Lafont fut d'abord un poète et c'est par la poésie qu'il entre en écriture. L’ampleur et la richesse de son œuvre poétique, plusieurs fois mise en musique des années 1960 aux années 2000, a été récemment mise en lumière par l’édition complète de son œuvre poétique  : Robert LAFONT, Poèmas 1943-1984, Montpeyroux, Jorn, 2011. 
Grâce à la collection de CD « Trésors d’Occitanie » (Aura - Occitània produccions), il nous est offert de pouvoir entendre un choix de poèmes dit par le poète lui-même.
L’extrait ci-dessous est la première partie du poème « Lenga d’òc », aussi intitulé dans certains recueils « A meis amics occitanistas » et qui s’ouvre par un vers devenu manifeste pour toute une génération : « Lo sol poder es que de dire » (le seul pouvoir celui de dire).

Dire, lo sol poder es que de dire  

Le recueil Dire (Toulouse et Rodez, Institut d'Estudis Occitans et Subervie, 1957) est le second recueil poétique de Robert Lafont. Il rassemble des poèmes écrits entre 1945 et 1953 et se divise en trois moments  : « Dire l’amor lei causas », « Flaüta sorna enamorada » et « Dire l’òme lo segle ». Ce recueil apparaît comme un manifeste poétique pour le présent et le futur : « Dire » c’est pour Robert Lafont s’approprier ce monde neuf qui s’ouvre, frotter sa langue « nue comme une fille » dit-il dans le poème aux aventures esthétiques et historiques de son temps. 
Le vers qui ouvre le poème : « lo sol poder es que de dire » (le seul pouvoir celui de dire) est devenu célèbre tant il fait figure a posteriori de programme pour une œuvre indissociable d’une pensée, d’une action, de toute une vie, dans lequel la génération occitaniste d’Après-guerre se retrouvera. 
« La lenga d’òc » dit par Robert Lafont dans cet extrait sonore, paraît sous ce titre dans le recueil Dire (1957). Il est repris dans Aire liure (P.J. Oswald, 1974), florilège de textes poétiques de l’auteur, sous le titre « A meis amics occitanistas ».
Le poème a été mis en musique par Jan-Mari Carlotti dans l’album Dire Robert Lafont (Arles, Mont-Jòia, 2005). 

L’enregistrement ci-dessous est un extrait du poème dit par Robert Lafont lui-même dans la collection CD « Trésors d’Occitanie » (Vendargues, Aura - Occitània produccions, 2000). 


Texte de l'extrait

Lo sol poder es que de dire.
Dire doç : una aranha
penchena lo soleu
sus lo pònt de l'aubeta.
Dire fèr : la montanha 
es una frucha amara
qu'enteriga lei sòrgas.
Dire larg : la marina
a pausat si doas mans
sus l'esquinau dau mond.
Dire amic : l'amarina.
(fin de l'extrait sonore)

Ma lenga es davant ieu
nusa coma una dròlla.
(fin de la première partie du poème)

Traduction française de l'extrait 

Le seul pouvoir celui de dire.
Dire doux : l'araignée
peigne le soleil
sur le pont de l'aurore.
Dire dur : la montagne
est comme un fruit amer
qui agace les sources.
Dire vaste : la mer
a posé ses deux mains
sur l'échine du monde.
Dire ami : l'amarine. 
(fin de l'extrait sonore)

La langue est devant moi
aussi nue qu'une fille.
(fin de la première partie du poème)

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