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L'âne de Gignac
CIRDÒC-Mediatèca occitana
L’ASE MARTIN
« Sur la fontaine de Gignac, Molière a (parait-il !) écrit : « Avide observateur, qui voulez tout savoir, Des ânes de Gignac, c’est ici l’abreuvoir ». L’homme de théâtre me ramène ici à ma simple situation d’animal... alors qu’à Gignac, l’Âne, je suis tout un symbole, comme le prouve la « Fête de l’Âne », établie le jour de l’ascension, pour me payer une dette de reconnaissance qui m’est bien due, en raison du service que j’ai rendu à la population du village... En fait, moi, l’Âne de Gignac, je suis un peu l’Oie du Capitole... »

LEGENDE
Vers le milieu du VIII ème siècle, à l’époque des invasions sarrasines, la ville de Gignac faillit être envahie par les guerriers maures. La nuit de l’Ascension de l’an 719, alors que ceux-ci s’apprêtaient à donner l’assaut, les habitants furent tirés de leur sommeil par les cris discordants d’un âne qui se mit à braire avec une puissance dont on ne l’aurait pas cru capable. La résistance fut aussitôt organisée du haut des remparts et la ville fut sauvée... Dès lors, l’âne devint l’animal totémique de Gignac. Et chaque année, cet événement est célébré le jour de l’Ascension, autour de l’Âne Martin...

Quand l’âne sort il est entouré de nombreux « mignons ». L’un d’eux tient d’une main la queue de l’âne, qui est en fait un pan de la robe, et décrit de l’autre main une foule de mouvements, en cadence avec la musique. Un autre mignon fait avancer l’âne en lui présentant un tambourin rempli d’avoine, et orné de rubans et de fleurs, tout ceci en exécutant des pas de danse en marche arrière... pendant que l’Âne essaie de lui attraper le tambourin en tendant la tête et en faisant claquer ses mâchoires !

En même temps que la fête de l’Âne a lieu, à Gignac, un spectacle de combat appelé « Sénibelet ». Ce spectacle, dont l’origine du nom est incertaine, commémore la résistance héroïque des habitants de Gignac face aux envahisseurs sarrasins : un homme représentant un sarrasin, porte un lourd casque de métal sur sa tête, elle même protégée sous le casque par plusieurs bonnets de coton. Il a pour arme un long bâton de bois d’alisier, représentant une épée, dont il se sert pour attaquer ses adversaires. Ceuxci, représentant les Gignacois, ont pour armes des racines de trentanel, arbuste provenant des garrigues environnantes, avec lesquelles ils frappent le sarrasin, cherchant à le renverser par la tête. Ils portent sur leur dos un coussin en paille pour se protéger des coups violents donnés par le sarrasin.
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Les acteurs du PCI à Pézenas
Lycée Jean Moulin (Pézenas)
Les élèves de l'option occitan du lycée Jean Moulin de Pézenas ont collecté plusieurs acteurs du patrimoine culturel immatériel qui font vivre les fêtes populaires et traditionnelles à Pézenas, notamment autour du Poulain.

Alain Charrié (musicien, professeur de fifre), Albert Lopez et Jérôme Fuentes (Président d'honneur et président des Amis du Poulain), Dalfina Palacio (Directrice de la Calandreta de Pézenas), Elian Blancher (ancien directeur de la Calandreta de Pézenas), Claude Alranq (acteur, auteur, metteur en scène, artisan du renouveau du théâtre méridional d'expression française et occitane) ont été interrogés selon la même grille d'enquête : 
- Qu'est ce que le PCI pour vous?
- Comment l'avez vous reçu?
- Comment le transmettez vous?
 
Cet enregistrement est un montage réalisé par les élèves à partir des différents collectages. L'ensemble des collectages est consultable sur simple demande, sur place, au CIRDÒC.
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Lenga d'òc/Lengo d'o : Cafè Òc a Sant Cristòu / Tè Vé Òc
Tè Vé Òc. Producteur
Émission du 02 juin 2017

Le Café Oc de Saint-Christol organisé par les amis de la Baragònha a été une belle réussite. Plus de 50 personnes étaient présentes pour écouter, parler et chanter la langue enseignée tout au long de l'année aux adultes par Jean Simar. Une famille, la famille Gros, fait renaître l'occitan au village de Saint-Christol. Une soirée riche au domaine Coste Moynier, dans un esprit très convivial.
Un reportage de Lise Gros.
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« Plus le futur interpelle, plus l'archaïsme répond » : les animaux de la fête occitane / Claude Alranq
Alranq, Claude (1947-....)
Conférence de Claude Alranq sur les animaux totémiques en Languedoc et le sens anthropologique qui sous-tend les rituels festifs.
Claude Alranq, acteur, conteur, auteur, metteur en scène, artisan du renouveau du théâtre méridional d'expression français et occitane depuis 1968, a été aussi enseignant-chercheur spécialiste de l'ethno-scénologie française et de l'histoire du théâtre des minorités en initiant notamment la première licence professionnelle artistique en France (2000) :  « ACTEURS -SUD » (interculturalité, transdisciplinarité, patrimoine culturel immatériel). Il collabore aujourd'hui à de nombreuses recherches et actions pour la transmission du patrimoine culturel immatériel et à son actualisation dans le domaine du spectacle vivant.
 
Conférence enregistrée en plein-air le 03/07/2016 à l'occasion du Forum Eurorégional Patrimoine & Création de Castelnaudary.
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La fête de la Saint-Jean de Cournonterral et son animal totémique le Tribus-Lupis
CIRDÒC-Mediatèca occitana Anna Wasniowska avec la collaboration de Perrine Alranq et Rachel Martin (CIRDOC-Mediatèca Occitana).

Le Tribus-Lupis. Photo. Anna Wasniowska

L'animal-jupon, bête de toile, ou encore animal-totem du village de Cournonterral est un Loup à trois têtes : le Tribus-Lupis.

Au mois de juin, à l’occasion de la Saint-Jean d’été, une créature étrange sort de sa tanière dans le village de Cournonterral ; c’est le Tribus-Lupis. Le Loup arpente alors les rues « pour rappeler à l’ordre tous ceux qui bafouent les droits durement acquis par les cornalencs 1 qu’il veille et protège ». 2

En effet, dans ce village où la tradition populaire est très présente grâce, entre autres, au Carnaval des Pailhasses3, un groupe d’amis « carnavaleux » s’est constitué, avec la forte envie de construire un animal-totem.
« Cela faisait des années qu’ils en avaient envie. C’est un village festif ici, mais il faillait avoir la pulsion... Comment expliquer ? Il fallait une personne qui lance. Alors je l’ai fait, j’ai dit on y va : cochon qui s’en dédit, on y va ! » raconte Nadège Guilhaumon, présidente de l’association « Le Chevalet de Cournonterral et ses Hautbois ».
C'est ainsi qu'en 2010 à Cournonterral naît le Loup à trois têtes nommé « Tribus-Lupis ».

1/ La pratique aujourd'hui

Personnes et structures associées :

Afin de réaliser cette fiche explicative, Anna Wasniowska a mené l'enquête à Cournonterral en juin 2014 auprès des personnes et structures suivantes :

Municipalité de Cournonterral :

Mairie de Cournonterral
12 Avenue Armand Daney
34660 Cournonterral
Tél. 04 67 85 00 11
www.ville-cournonterral.fr/

Structures ressources / Associations :

- Association « Le Chevalet de Cournonterral et ses Hautbois »
https://fr-fr.facebook.com/Chevalet-de-Cournonterral-217881264912827/ 
- Le GRAC : Groupe de Recherche des Archives de Cournonterral.
http://www.cournongrac.org/accueil.html
- Association « Cournon Terra d’OC »
- Confrérie des Pastaïres et Tastaïres du Pays d’Oc
http://www.confreriesdulanguedocroussillon.com/pastairestastair/index.html
- Confrérie Saint Photin de Varages

Personnes rencontrées :

- Nadège Guilhaumon : présidente et co-fondatrice de l’association « Chevalet de Cournonterral  et ses Hautbois », porteuse du projet.
- Eric Livolsy : musicien hautboïste, compositeur de musique pour le Tribus-Lupis, membre de l’association « Chevalet de Cournonterral et ses Hautbois ».
- Jacques Teilhard : membre du comité de recherche du GRAC (Groupe de recherche des Archives de Cournonterral) et trésorier de l’association « Cournon Terra d’Oc ».
- Georges Guilhaumon : constructeur du Tribus-Lupis.
- Laurent Régis : meneur du Tribus-Lupis.
- Alexandre Vanruymbeke : boulanger ; un des quatre boulangers participant à l’élaboration du pain « Tribus-Lupis ».



Déroulement :


Au mois de juin, à l’occasion de la Saint-Jean d’été, Tribus-Lupis sort de sa tanière. Cet animal de toile, guidé par son meneur et porté par huit hommes, animera les rues de la ville pendant de longues heures. Au son des fifres, hautbois et tambours, le Loup à trois têtes dansera le jour de sa fête.

« Il y aura toujours une sortie du Loup au mois de juin, au solstice d’été. Parce qu’on associe au loup, l’eau, le feu, la flamme de Canigou, Cournonterral est une ville relais pour la flamme de Canigou, ces trois éléments. Et en plus de ça, il y a chez nous cette histoire du four, du feu, du pain. Le seul événement où le Loup a vraiment sa place c’est au mois de juin. » Nadège Guilhaumon, présidente et co-fondatrice de l’association « Chevalet de Cournonterral et ses Hautbois ».

Nous nous sommes donc penchés sur le déroulement et l'organisation de la fête de la Saint-Jean à Cournonterral.

La fête de la Saint-Jean
Juin 2014 :

La fête de la Saint-Jean, qui à cournonterral célèbre le Tribus-Lupis, se déroule dans l’enceinte de la vieille ville : entre le four du village, la place du village, les remparts et l’esplanade.

La cuisson du Pain "Tribus-Lupis" dans le four banal :

La cuisson du pain Tribus Lupis. Photo. Anna Wasniowska

Le 14 juin 2014, la journée commence vers 9 heures du matin par la mise en route du four banal3.
Le boulanger Alexandre Vanruymbeke, accompagné par Jacques Teilhard, lui-même fils de boulanger, commence la fabrication du pain « Tribus-Lupis ».
L’élaboration de la recette a commencé quelques mois avant la sortie du Loup. En effet, Pierre Pic (grand maître de la Confrérie des Pastaïres et Tastaïres du Pays d'Oc), Didier Peitebi, Alexandre Vanruymbeke et Jacques Teilhard ont mis en place un cahier des charges pour cette recette qui fait écho à l’origine du totem local (Cf. Chapitre 3/Histoire de la pratique). 
Jacques Teilhard nous livre le secret : « Le pain "Tribus-Lupis" se compose de trois boules, aux trois goûts différents. La première boule correspond à l’entrée : elle est au thym ; la deuxième au plat de résistance : elle est à l’olive noire ; et la troisième est servie au moment du dessert : elle est aux figues. A partir de maintenant, la fabrication du pain va avoir lieu à chaque fois au mois de juin, à l’occasion de la sortie du Loup ; mais aussi à chaque fois que les gens feront la demande pour une occasion importante.

La cuisson du pain "Tribus Lupis". Photo. Anna Wasniowska"

La cuisson du pain Tribus Lupis. Photo. Anna Wasniowska

La danse du Chivalet :

Plus tard, les visiteurs, invités par la musique, assisteront à la danse d’ouverture5 du « Chivalet » (qui ressuscite en 2011 après presque 30 ans d'absence).
« Autour du cheval, quatre personnages dansent : un à l’avant, qui est le donneur d’avoine ; un second à droite, chargé du chasse-mouche qui excite l’animal ; le danseur de gauche porte l’étrille et la brosse ; enfin, le quatrième, à l’arrière, représente le maréchal ferrant, équipé de tenailles et d'un marteau. »4
La danse du Chivalet a une particularité cette année-là à Cournonterral : elle est dansée par cinq jeunes filles.

Danse du Chivalet – 14/06/2014. photo. Anna Wasniowsk

D’autres animations rythment la fin de la matinée : la danse des treilles, des expositions, des stands d’artisans locaux, etc. Puis, pour clôturer cette matinée, un apéritif convivial sera servi au public qui pourra goûter le pain « Tribus-Lupis ».

La sortie du Tribus-Lupis :

Pendant ce temps, l’animal totémique attend sa sortie imminente. Logé au domicile de la présidente de l’association « Le Chevalet de Cournonterral et ses Hautbois », le « Tribus-Lupis » voit arriver une joyeuse troupe qui va, pendant quelques heures, s’apprêter pour l’événement. Les tâches sont nombreuses et diverses : il s’agit de l’habillage des musiciens, des porteurs et du meneur, de préparer le héros de la journée et de répéter une dernière fois quelques morceaux de musique pour être fin prêts.

Aux alentours de 16 heures, le Loup à trois têtes sort de sa tanière ; il a rendez-vous avec la population sur l’esplanade. Mais déjà, sur son chemin, nombreux sont ceux qui se joignent à lui pour l’accompagner et être au premier rang.
Sur l’esplanade Cournonterralaise, en plus des villageois et visiteurs venus assister à l'événement, l'animal-totem est attendu par d’autres acteurs de la fête. La « Confrérie Saint Photin de Varages », la « Confrérie des Pastaïres et Tastaïres du Pays d’Oc », ainsi que trois personnes déguisées, représentant des personnages historiques importants : Erméniars la sœur de Guillaume Bernard des Trois Loups, le seigneur Pierre de Cournonterral, et le sénéchal de Beaucaire l’accueillent lors de son arrivée. (Cf. Chapitre 3/ Histoire de la pratique).
La première danse commence et, avec elle, se fait ressentir une certaine excitation mêlée de fierté : Le Tribus-Lupis est de sortie ! Si cet animal de toile a une importance pour la communauté c’est parce qu’il porte en lui la revendication du peuple, de celui qui subit l'abus et l'injustice. En effet, selon sa légende, il défend les droits, l'égalité et la justice pour tous les villageois de Cournonterral.

Dessin de Richard Escobossa

Malgré son jeune âge, l’équipe autour de l’animal totémique de Cournonterral a su mettre en place quelques éléments qui reviennent lors de chaque sortie. Après la danse de bienvenue, le Tribus-Lupis entame une longue déambulation à travers la ville, ponctuée par des haltes en plusieurs lieux pour des actions bien définies :

La reconstitution historique de l’arrêté du roi Philippe le Bel :

Arrivé sur la place Pierre Viala, devant les Halles, le Tribus-Lupis assiste à la reconstitution de l’événement historique qui a donné lieu à sa naissance. Sous les yeux des spectateurs se rejouent les faits, datant de 1299. La Confrérie Saint Photin de Varages, représentant les soldats-mandataires du roi, accompagne la lecture par des salves6 de tromblons. Le sénéchal de Beaucaire déroule un parchemin pour annoncer aux villageois l’ordonnance du roi Philippe le Bel, exigeant la réparation des méfaits causés par le seigneur Pierre de Cournon. Le dénommé Pierre de Cournon « voulant s’enrichir et affamer les habitants, fit restreindre l’accès au four banal et commanda la destruction du foyer communal afin que les gens lui payent une taxe pour faire cuire leur pain »7. Puis Erméniars, la sœur de Guillaume Bernard des Trois Loups, suit la lecture.

La restitution de la clef du four banal :

Après la lecture de l’édit royal, vient le moment de la restitution symbolique de la clef du four banal. La mise en valeur du four ainsi que l’importance du pain « Tribus-Lupis » sont appuyées par la présence de la Confrérie des Pastaïres et Tastaïres du Pays d’Oc, qui fait partie intégrante de l’événement. Ce groupe, représentant le corps des boulangers, dirigé par le « Grand Maître » Pierre Pic, préside ce moment important. La confrérie accompagne le Tribus-Lupis au pied de la tour sarrasine, où se trouve le four banal ; alors l’animal-totem rentre dans la petite cour et la clef du four lui est restituée. C’est aussi le moment de la dégustation officielle du pain et l'occasion de boire le vin local.

L'enfermement des enfants sous la carcasse du Tripus-Lupis :

Le public est composé de nombreuses personnes de tout âge lors de la sortie du loup à trois têtes ; mais ceux qui apprécient tout particulièrement cette journée ce sont bien les enfants, car la bête leur réserve une surprise ! Lors d'un certain arrêt dans le parcours, le meneur appelle les plus jeunes à entrer sous le ventre du loup...
« On a fait une ouverture devant, dans le loup. Les enfants rentrent dedans, mais ils ne sortent pas par le derrière du loup ; il les cague pas, il les régurgite. » nous explique Nadège Guilhaumon. En effet, d’autres animaux (comme le Bœuf de Mèze ou le Pélican de Puisserguier) avalent les enfants lors de leur défilé, mais la sortie se fait toujours par le derrière de la bête. Cournonterral a souhaité ajouter à cette tradition sa petite touche personnelle.



Organisation :


Les porteurs de l'événement :

L’événement est porté par l’association « Le Chevalet de Cournonterral et ses Hautbois », qui répond chaque année à l’appel à projet lancé par le Conseil Régional Languedoc-Roussillon, dans le cadre du Total Festum. Le projet « Total Festum » a pour but d'encourager la promotion des cultures occitanes et catalanes, autour de la tradition des feux de la Saint-Jean. Cournonterral, en répondant à cet appel, a choisi de mettre au centre du projet son animal emblématique et, par là même, de bénéficier d’un financement extérieur.

Participation de la municipalité :

La mairie de Cournonterral attribue une subvention à l’année à l'association « Le Chevalet de Cournonterral et ses Hautbois » pour l’ensemble de ses activités et les élus sont présents à l’apéritif officiel de la fête de la Saint-Jean, lors de la restitution de la clef du four banal. Enfin, la commune prête, pour l'occasion, le lieu où le four banal a été reconstruit.

Participation de la communauté :

Les spectateurs sont au rendez-vous le jour de la sortie du Loup. Le public accompagne le Tribus-Lupis tout en profitant des animations proposées. L’animal semble rentrer petit à petit dans l'esprit et les habitudes des cournonterralais et, ainsi, trouver une place dans le paysage du patrimoine local.
L’association « Le Chevalet de Cournonterral et ses Hautbois » est très soucieuse de la valorisation de l’animal emblématique de la ville ; elle participe avec intérêt à toute action ayant pour but la mise en valeur ou la promotion du Loup à trois têtes.

Les musiciens :

Au conservatoire de Cournonterral ont lieu les cours d’instruments traditionnels. Les musiciens se rencontrent toutes les deux semaines pour jouer ensemble et préparer ainsi la sortie de leur animal-totem.

Les moyens humains :

Le Tribus-Lupis est un animal porté par huit hommes et guidé par son meneur, dont on dit qu'il est "les yeux du loup". Le meneur, qu’on appelle aussi "La Fillasse", c’est Laurent Régis. « On a essayé de choisir quelqu’un qui est apprécié, que les gens apprécient, et il fait partie des gens qui avaient envie de créer un animal totémique » nous explique Jacques Teilhard.
La bête se fait accompagner par trois figures de l’histoire locale : Erméniars, la sœur de Guillaume Bernard des Trois Loups ; Pierre de Cournon, le seigneur du bourg, et le sénéchal de Beaucaire. La confrérie de Saint Photin de Varages ainsi que celle des Pastaïres et Tastaïres du Pays d’Oc font également partie du cortège. Mais les accompagnateurs officiels les plus nombreux sont les musiciens : ils sont environ une vingtaine de personnes. Tous portent un tabard8 et un pantalon, ce qui accentue l'unité du groupe, bien que chaque costume soit personnalisé.

Le meneur et l'équipe des porteurs du Tribus Lupis. Photo. Anna Wasniowska




Personnages historiques : Pierre de Cournon et sénéchal de Beaucaire. Photo. Anna Wasniowska



Matériaux et accessoires :


Le Tribus-Lupis :

Le Tribus-Lupis est un animal presque entièrement noir, si ce n'est les armoiries de Cournonterral qui figurent de chaque côté de son corps et une bande bleue qui en fait le tour, en bas.
Le blason de Cournonterral

Sa carcasse est une armature en fer recouverte d’un tissu noir synthétique ressemblant à de la fourrure. Elle mesure 3m90 de longueur, 1m70 de largeur et 2m de hauteur. C’est une copie exacte de la structure de l’animal voisin, le Poulain de Pézenas. Le Tribus-Lupis a été conçu pour être plus haut devant, comme s’il était prêt à bondir.

L'ensemble des trois têtes de la bête mesure 1m20 de largeur, 70cm de hauteur et 80 cm de profondeur. Le constructeur des têtes du Loup, Georges Guilhaumon, raconte : « Les têtes ont été faites en polystyrène. Ensuite, la sculpture a été collée sur une plaque de bois et le tout a été recouvert de bandelettes de fibres de verre et de résine. Après, comme le relief avait disparu, on l’a recréé avec la pâte de papier mâché, comme par exemple pour les arcades ou les naseaux, en mettant à la fin du vernis ».

Les têtes sont montées sur un cardan de 2CV, qui leur permet d’être mobiles. Une personne, parmi les porteurs, est chargée de faire bouger les têtes. Les crocs en buis, les yeux en terre émaillée, les dents et la langue en pâte Fimo, confèrent à la bête une physionomie réaliste.

Les trois têtes du Tribus Lupis. Photo. Anna Wasniowska


Danses et musiques :


La danse :

Dans la danse, comme dans la musique du Loup, il y a deux temps. Pendant la marche, le meneur, muni d’un tambourin, fait se balancer le Loup. Il incite aussi le public à participer. La danse est effectuée sur différentes places à des moments stratégiques ou, tout simplement, parce que l’équipe sent que c'est le bon moment. Quelques coups de tambours suffisent pour que toute l’équipe se mette en branle (voir le lien vidéo?). Au moment de la farandole aussi, les porteurs accompagnent la rythmique en faisant sauter l’animal.


La musique :

A la demande du groupe constitué autour du Tripus-Lupis, Eric Livolsy a pris en charge l’écriture de la partition de la musique du Tribus-Lupis. Faute de temps, seul le prélude fut écrit à temps pour la première sortie du Loup ; mais le morceau fut écrit en entier par la suite. La première partie est une marche lente. L’auteur, Eric Livolsy, explique : « L’inspiration pour l’écriture de ce morceau, je l’ai trouvée dans la légende elle-même. Et dans la deuxième partie, plus festive, vu que je n’ai pas eu le temps de finir, j’ai pris "La poulaillère"9. Le prélude n'étant pas facile […], "la poulaillère" a permis aux musiciens d’intégrer plus rapidement le morceau entier. Aujourd’hui, le morceau est en place, même s’il n’est pas facile. La marche est jouée par les hautbois, et "la poulaillère" par les fifres, ce qui permet aux musiciens de se reposer entre les deux parties ».


2/ Transmission de la pratique

Intérêt patrimonial et mesures de sauvegarde :

Sauvegarder, réactualiser, valoriser, créer :

La sortie officielle du Tripus-Lupis, au mois de juin, est organisée dans le cadre de l'appel à projet Total Festum, et est ainsi soutenue par la Région Languedoc-Roussillon.
Outre sa sortie officielle, le Loup à trois têtes est régulièrement sollicité pour divers rassemblements d'animaux emblématiques ou autres manifestations, à commencer dans sa ville natale. Lors du Carnaval local, le Tripus-Lupis pointe généralement le bout de son nez pour faire partie du défilé des chars. Les autres villes font aussi appel à lui pour de multiples occasions, comme la Foire Languedocienne de Loupian, le Festival Occitània à Toulouse, etc. Aujourd’hui, le Loup de Cournonterral est un animal très prisé.

Le Tribus-Lupis est mis en valeur dans des articles de presse, ou sur le site de la ville de Cournonterral : www.ville-cournonterral.fr/ ; mais il a aussi son propre site Internet : http://cournontotem.canalblog.com/.

Depuis 2006, le Conseil Régional Languedoc-Roussillon « encourage la promotion des cultures occitanes et catalanes » dans le cadre de l'appel à projets Total Festum, qui se réalise tous les ans au mois de Juin. Cet appel à projets, ouvert à tous, prend en compte depuis 2013 la question de la valorisation du Patrimoine Culturel Immatériel, en ajoutant un article valorisant les projets autour du Patrimoine vivant : « La Région attire [...] l'attention des porteurs de projets sur l'intérêt à développer des actions autour du Patrimoine Culturel Immatériel tel que le définit l'UNESCO [...] ». Cet appel à projets a permis la création du Tribus-Lupis ainsi que d'autre animaux totémiques, et d'aider aux financements de rencontres d'animaux totémiques.

Apprentissages et transmissions :


Transmissions autour de l'animal totémique :

L’association « Le Chevalet de Cournonterral et ses Hautbois » prend en charge la transmission d'un meneur à l'autre, ainsi que des porteurs. Le groupe de porteurs, réuni autour du meneur Laurent Régis, se constitue à l’improviste en amont de la manifestation. C’est un groupe d’amis qui prend plaisir à porter le Loup, restant engagé par ailleurs dans les nombreux tournois sportifs ayant lieu au mois de juin. De fait, l’association souhaite à l’avenir constituer un collectif de porteurs attitrés.

Les musiciens, eux, se préparent tout au long de l’année. Les cours de musique se déroulent au conservatoire et sont ouverts à tous. Tous les quinze jours a lieu une répétition entre les différents groupes d’instruments lors de laquelle se joue (entre autres) la musique du Tribus-Lupis.

Dans les écoles du village, chaque année, l’association « Le Chevalet de Cournonterral et ses Hautbois » intervient en proposant des ateliers de sensibilisation autour du Tribus-Lupis. « Cette année, nous avons travaillé avec les enfants en leur faisant faire leur totem, où ils ont accroché des messages de revendications. Le totem s’est fait lors des ateliers menés en amont dans les écoles primaires » témoigne la présidente de l'association.


Transmission de la légende :

La transmission de la légende du Tribus-Lupis, outre les supports « multimédias », se fait lors de la sortie de l’animal pour la Saint-Jean. En effet, lors de la fête, une des haltes dans le parcours lui est entièrement consacrée (Cf. chapitre 1/ La pratique aujourd'hui). A Cournonterral, la légende du tribus-Lupis est donc placée au centre du rituel qui l'honore ; son défilé se réfère sans cesse aux faits historiques à l'origine de cette légende.

3/ Histoire de la pratique

Le Tribus-Lupis a rejoint le bestiaire fantastique languedocien assez récemment. L’équipe porteuse, fêtant le Carnaval des pailhasses en 2010, a eu l'envie d’enrichir davantage les traditions locales. Un comité, ou plutôt une bande d’amis, animée par la verve populaire, a commencé un long cycle de rendez-vous de réflexions, puis d'actions. La première action du groupe fut de faire revivre la danse du Chevalet de Cournonterral. Par la suite est venue la naissance de l’animal emblématique du village, le Tribus-Lupis.

Sa collaboration avec Lo GRAC (Groupe de Recherches des Archives de Cournonterral) a amené le groupe sur la piste de Guillaume Bernard des Trois Loups. Ce bourgeois jouera un rôle important dans l’histoire de Cournon. En 1299, les Syndics11 de Cournon sont nés et Guillaume Bernard en fait partie.
A cette même époque, de nombreuses querelles divisant la population et les seigneurs, un nouveau conflit éclate : « l’affaire du four banal ». Les porteurs du projet ont choisi cet événement historique pour bâtir la légende du Loup à trois têtes, qui représente l'âme contestataire et revendicatrice des cornalencs ainsi que leur force face à l’injustice et l’abus.


Légende du Tribus-Lupis :

Nadège Guilhaumon et Richard Escobossa ont co-écrit la légende du Tribus-Lupis. En voici quelques extraits :

« Sous le règne de Philippe Le Bel, les loups hantaient nos campagnes, leurs voix se faisaient entendre dans nos bois et garrigues […].
A cette époque vivait un personnage qui a marqué les mémoires : Guillaume-Bernard de Trois-Loups. Son tempérament de justicier l’a amené à monter une expédition punitive contre Rascousses à qui les seigneurs de Cournon avaient donné le droit de paissance sur les terres communales et, en cette période de pénurie, il ne faisait pas bon d’empiéter sur les voisins. Guillaume-Bernard des Trois-Loups n’était pas seul, deux autres personnes l’accompagnaient. Une harpie, rombière acariâtre, meneuse de troupe et forte en gueule qui n’hésitait pas à jouer des mains au besoin, une querelleuse du nom d’Erméniars, et Hugues Cristine, défenseur des libertés et des droits acquis.
Dans ces temps de conflits, la Bête […], resurgit d’outre-tombe pour montrer le chemin de la résistance aux gens. Tous unis contre l’adversité et les charges abusives de leurs seigneurs […].
Pierre, seigneur du bourg, voulant s’enrichir et affamer les habitants, fit restreindre l’accès au four banal et commanda la destruction du foyer communal afin que les gens lui payent une taxe pour faire cuire leur pain. La tâche lui fut aisée grâce aux dissensions et à la division de la population. Pourtant, dans le village, sommeillait Tribus-Lupis. Non seulement guerrier effrayant, mais aussi fédérateur de la populace. Le même animal qui avait plié les genoux du seigneur Raymond Vassadel, quelques temps auparavant. Sorti de son antre, de l’endroit même où sont enterrés les combattants d’une lutte avec des voisins belliqueux, Sainte-Cécile-des-Trois-Loups, l’animal de par sa présence et sa force donna aux Cornalencs la volonté de résister et obligea Pierre de Cournon à libérer l’accès au four et à reconstruire le foyer qu’il avait fait détruire […].
Il est dit qu’à chaque période trouble les loups arpenteront les rues du village pour rappeler à tous ceux qui menacent les droits durement acquis par les Cournonterralais qu’ils seront toujours là à veiller.
 »

On trouve aussi, sur le site Internet "Cournon TOREM Tribus-Lupis", cette légende:
« Au XIIIè siècle les Cornalencs sont affamés par les périodes de disettes et les contraintes infligées par leur seigneur, l’esprit de révolte plane et gronde, mais la désunion règne dans le village. Le seigneur, afin de renflouer sa cassette, détruit le four communal, contraignant les villageois à payer pour l’utilisation du four banal. Ce qu’ignore le seigneur c’est qu’une bête sommeille dans son antre, infernale, terrifiante, au poil hirsute, aux dents aiguisées, à la gueule sanglante et fumante, une espèce de loup à trois têtes : TRIBVS LVPIS. Elle descend de nos garrigues, de l’église Ste-Cécile ; elle incarne l’âme Cornalenque depuis la nuit des temps. Antan, elle aurait fait fuir les cornacs d’Hannibal. Investis de cet esprit contestataire, trois bourgeois, Guillaume-Bernard des Trois-Loups, sa soeur Erméniars et leur ami Hugues Cristine, fomentent un mouvement de révolte ; le seigneur assis sur ses acquis va être surpris. De nuit, la Bête s’approche du bourg en arrivant par le Baou, franchit la porte du Couchant ouverte par les trois reboussiés. TRIBVS LVPIS passe devant le four détruit, se dirige vers le château ou dort sereinement le seigneur. Des hurlements venus d’outre tombe le réveille, lui glace le sang ; affolé il passe sa tête par la lucarne et là une foule, torches et armes en mains, scande la révolte. En tête, la bête se dresse sur ses pattes arrières, l’une de ses têtes est à hauteur de lucarne, la gueule ouverte, rageuse. Le seigneur terrifié se barricade dans l’enceinte du château. Le siège dure toute la nuit ; c’est au petit jour qu’il rend les armes et les soldats livrent le despote affameur aux insurgés. Il franchit, fier et hautain, le seuil de son domaine ; mais face à l’adversaire, à la vue des trois gueules, résigné, il s’allonge sur le sol face contre terre et demande grâce. Il lui est ordonné de se lever, lecture lui est faite de l’édit du roi Philippe le Bel lui intimant de reconstruire le four rapidement, conseil lui est donné d’entendre à jamais chaque revendication de celui qui subit l’abus ou l’injustice. Cette histoire est finie, mais la Bête sommeille dans son antre et ressortira durant des siècles et encore de nos jours pour défendre le droit, l’égalité et la justice pour tous. TRIBVS LVPIS, animal légendaire ou réelle âme de notre collectivité ? Peu importe, quoiqu’il en soit, le loup arpentera les rues pour rappeler à tous ceux qui bafouent les droits durement acquis par les Cornalencs qu’il veille et les protège. »12


Le four communal de Cournonterral. Photo. Rachel Martin

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Fête de l'Âne de Bessan / Hélène Morsly, réalisatrice
Morsly, Hélène. Metteur en scène ou réalisateur.
L'Âne est l'animal dit totémique de Bessan (Hérault).

Chaque année, la Saint-Laurent, la grande fête des Bessanais, se déroule en août sur cinq jours, week-end inclus. Les sorties de l’Âne constituent les moments forts de ces journées connues aussi sous le nom de « fête de l’Âne ». Le dimanche en est marqué par une messe et une bénédiction en présence de l'animal qui précèdent la déambulation dans les rues de la ville.

Ces images filmées par Hélène Morsly les 9 et 10 août 2014 donnent à voir ces rituels.
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Vidéoguide : Le Poulain de Pézenas (en langue occitane sous-titrée français)

Animal "totémique" de Pézenas, le Poulain figure depuis 2005 au classement du patrimoine oral et immatériel de l'humanité de l'UNESCO.  Cet équidé de toile et de bois accompagne les Piscénois dans toutes leurs festivités.

Ce vidéoguide d'animation a été réalisé en 2014 dans le cadre du projet e-Anem, financé par le FEDER en Languedoc-Roussillon.

Version occitane sous-titrée en français.

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Le Poulain de Pézenas
Centre inter-régional de développement de l'occitan (Béziers, Hérault)

C'est conjointement aux géants du Nord, que le Poulain de Pézenas fut classé à l'UNESCO en 2005. Toutefois, force est de constater la fréquence et l'abondance de ces animaux totémiques dans le Midi de la France en général et dans le Bas-Languedoc en particulier.

1/ Le Poulain, cheval de bois et de toile

Le Poulain de Pézenas, cheval de bois et de toile

La structure du poulain de Pézenas est similaire à bien d'autres exemples de chevaux de bois. Elle était à l'origine faite de bois, probablement de châtaignier, couverte d'une vaste toile bleue portant des emblèmes dont la nature changea au gré des évolutions politiques.
 
La toile bleue du Poulain affiche ainsi en alternance les couleurs de la royauté, de la République ou les abeilles impériales. Le Poulain rassemblant derrière lui la communauté piscénoise (les piscénois sont les habitants de Pézenas), suscitant tout à la fois peur et attraction sur la population, fut d'ailleurs victime de sa fonction symbolique lors de la Révolution française. Alors assimilé à la royauté (sa légende le rattache en effet à ce régime) le poulain fut ainsi brûlé en 1789.
 
La structure elle-même a également évolué avec le temps. À compter de 1989, l'aluminium plus léger, remplace la lourde armature de bois. Le poulain prend alors le chemin de l'Inde aux côtés d'autres figures totémiques dont la Tarasque de Tarascon, afin de représenter les traditions françaises à Bombay et New Delhi dans le cadre de l'année de la France en Inde.
 

Une figure emblématique

Le Poulain figure depuis 2005 au classement du patrimoine oral et immatériel de l'humanité de l'UNESCO, dans le cadre d'une reconnaissance commune à la France et à la Belgique, de leurs géants et figures totémiques.
 
Chivalets, chivaus-frus, chaval dragon, treva-chaval... sont en effet autant de manifestations de bois et de toile qui accompagnent les manifestations et rituels de leur cité, rassemblant autour d'eux la communauté, et constituant à ce titre un élèment du patrimoine culturel immatériel.
 
Liés à une légende ou à un fait d'histoire locale, l'attachement des habitants à ces animaux de toile remonte parfois loin dans le temps, et survit au temps qui passe. Ces bêtes de toile sont ainsi peu à peu devenues emblématiques d'une ville. Ils demeurent le symbole des liens étroits et souvent complexes que l'homme entretient avec l'esprit des Lieux et sa propre Nature. Sans être uniquement cantonné aux fêtes carnavalesques, ces animaux-jupons s'intègrent fréquemment dans ces festivités.
 
Dans la longue liste d'animaux totémiques de l'Hérault, le Poulain de Pézenas connaît comme Lo Camel de Besièrs ou le Drac de Beaucaire, une place particulière. "Los Polins" connaissent en pays piscénois un réel succès. A l'aîné de la cité royale, s'ajoutèrent progressivement ceux d'Adissan, d'Alignan-du-Vent, Florensac, Montblanc, Saint-Thibéry, Vias... Celui de Pézenas, possède toutefois une place à part. Il constitue a priori l'une des formes les plus anciennes connues dans la région, dont la légende, le ferait remonter aux temps épiques de la Croisade des Albigeois.

2/ Les origines mythiques du Poulain

Le poulain de Pézenas aurait pour mythe originel, la venue en 1226 du roi de France Louis VIII à l'occasion de la Croisade contre les Albigeois La jument préférée du monarque serait alors tombée malade. Confiée à des consuls de la ville, loin de décéder d'une quelconque maladie, la jument met finalement bas. Découvrant le jeune poulain à son retour à Pézenas, le roi demande la construction d'un équivalent de bois, afin de commémorer l'événement. Ce modèle de toile et de bois accompagnent depuis les fêtes de la cité, fêtes religieuses et fêtes calendaires, tel le Carnaval.
 
La légende connaît une seconde étape "royale" en 1622, lors du passage du roi Louis XIII. Le maréchal de Bassompierre devant traverser la Peyne sur son cheval, et croisant une paysanne en difficulté, la fait monter en selle avec lui, tous deux franchissant ensemble la rivière. L'anecdote conduisit à la construction de deux mannequins de bois, Estieinon et Estieineta, toujours visibles sur le dos de l'animal.
 
C'est également à cette date et en dépit d'une légende qui le voudrait plus ancien, que le Polin est pour la première fois mentionné dans les archives de la ville faisant de lui l'un des plus anciens animaux de toile du département (si ce n'est le plus vieux). Quant à sa légende elle-même, elle fut rapportée une première fois en 1702 par Le Mercure Galant et par la suite enrichie par le chroniqueur piscénois Pierre Poncet. Celle de Bassompierre aurait été forgée tardivement, aux alentours du XIXe siècle, par Albert-Paul Alliès sur la base de la venue dans la ville du monarque Louis XIII tandis que d'autres commentateurs, tel Claude Achard, voient en ce couple un rappel de Grandgousier et Gargamelle, les parents de Gargantua qui selon la légende, firent également un passage par la cité piscénoise.
 
La mention de ce couple rappelle quoi qu'il advienne la proximité entre l'animal totémique et la fête de Carnaval, à l'occasion de laquelle le Poulain parade dans les rues, au son des hautbois et du fifre, et invite la population à danser.

3/ Carnaval de Pézenas, quand le Poulain s'en va danser...

Le charivari de la Sant Blasi

Saint Blaise, ou Sant Blasi de son nom occitan, protecteur des cardeurs (artisans textile) devint également saint patron de la ville, qui fut dès le Moyen Âge un important centre drapier. Son culte est célébré à Pézenas au moins depuis 1299, suite à la mobilisation des corporations drapières de la ville. Fête patronale la Sant Blasi ouvre également à Pézenas les festivités de Carnaval, durant lesquelles apparaît guidé par lo menaire (le guide en occitan), le Poulain emblématique.

La danse du poulain

La sortie du Poulain à Pézenas correspond à un rituel bien précis mêlant danse et musique.Au son des hautbois et des tambourins, instruments traditionnels en Languedoc, lo menaire vêtu de rouge et de blanc effectue sa danse frénétique, lançant le charivari survolté de l'animal.

Dissimulés sous la lourde toile bleue, les neufs porteurs animent le squelette de bois, lui faisant parcourir les rues à la rencontre de la population. Ruades et pirouettes attisent la curiorité, mais aussi l'affolement de la population. Ces mouvements saccadés alternent avec les claquements de la mâchoire articulée, la nhaca, qui s'ouvre ponctuellement pour avaler l'obole des passants.
Le cheminement du poulain le mène successivement, et selon un parcours immuable, dans le centre ancien de la ville : Cours Jean-Jaurès, place de la République, rue Anatole-France, boulevard Sarrazin, route de Béziers, place du Quatorze-Juillet, rue François-Oustrin, place Gambetta, rue Alfred-Sabatier, rue Emile-Zola.

La danse des treilles

Parallèlement au Poulain, figure au patrimoine culturel immatériel de la ville la danse des treilles. Celle-ci est menée par le cap de joven ("chef de la jeunesse"). Traditionnellement, les jeunes, filles et garçons, se regroupent et tiennent deux par deux un arceau de bois orné de pampres et de feuillages : la trelha (la treille). La danse s'articule en une dizaine de figures et un final. Si la musique est commune pour l'ensemble des villes et villages du département qui pratiquent cette danse, il arrive que les paroles de la chanson diffèrent. Tel est le cas à Pézenas. Le meneur y porte le nom de Ortola, et voici la chanson entonnée pour inciter les couples à passer sous les treilles :
"E Ortola, passo se bos passa – E passo jhoust les treios. E Ortola – passo se bos passa – E passo de dela;" (version donnée par A.-P. AllièsUne ville d'états : Pézenas aux XVIe et XVIIe siècles, Molière à Pézenas Montpellier, Éd. des Arceaux, 1951).
 
Les treilles semblent avoir été dansées pour la première fois à Pézenas en 1564, à l'occasion du séjour du roi Charles IX dans la ville. Elles furent par la suite associées à la fête des Caritats, qui perdura dans la ville jusqu'à la fin du XIXe siècle.
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La baptême du Tribus Lupis de Cournonterral en images
L'animal totémique de Cournonterral, le Tribus Lupis, a été baptisé le 9 juin 2012.

Cette vidéo amateur donne à voir le loup à trois têtes, dont la légende veut qu'il ait châtié un seigneur qui tyrannisait les Courmonterralais. Il déambule dans les rues de ce bourg de l'Hérault, accompagné de ses parrains, le Poulain de Pézenas, le Pélican de Puisserguier et la Confrérie de Saint Photin.
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Claude Alranq
Fred Cot
Johan Hannequin, photographe
Le 19 mai 2012, un nouvel animal totémique voit le jour dans l'Ouest héraultais, le Pélican de Puisserguier, à l'initiative des Goulamas'K. Ce "dossier du patrimoine culturel immatériel" reprend les différents temps de l'événement.
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