Formé en 2015 par Louis Pezet et Hugo Collin, Feràmia est un groupe toulousain de musique actuelle en occitan.
Ses influences éclectiques, de l'electro à la chanson, en passant par le jazz et quelques excursions éthiopiennes, donnent à entendre une lecture originale de l'occitan et de ses univers. Le premier album de feràmia, "Lo drac pòt èsser tanben una soca", parait en septembre 2016.
« Feràmia », « bête sauvage » en languedocien, mais le terme a ici une connotation mythologique, fantastique. Le mot Feràmia fait ainsi référence à ces créatures que les fantasmes des hommes ont amenées à la vie au cours des âges. Plus qu’une identité, encore en construction, c’est une ambition que porte ce nom. L’ambition de retravailler la littérature occitane, la langue, son bestiaire, bref, son univers, à travers une musique vivace et multiple… Cependant, ici, nulle « fossilisation » nostalgique des racines perdues, Feràmia n’entend pas reconstituer un enième musée, visant à défendre une « culture », ou un « patrimoine », qui se substituerait à la mémoire des hommes. Le but est plutôt de s’introduire nuitamment dans ces musées, d’en briser les vitrines, de voler tout ce qu’elles contiennent, de les emporter dans une île, et, fidèles aux enseignements du docteur Monroe, de les reconstruire, de les hybrider, de leur insuffler de la vie et de la sauvagerie, pour créer de nouvelles « Feràmias », de nouvelles créatures fantastiques.
La musique portée par Feràmia se veut elle aussi pilleuse de tombes. L’auditeur n’entendra pas ici de musique traditionnelle occitane, et il sera certainement surpris par le décalage entre le contenu des textes, par exemple des poèmes occitans du début du XXe, et le langage musical utilisé dans l’interprétation. Car il en ressort quelque chose qui s’apparente plus à Frankenstein qu’à la récitation de poème avec accompagnement musical. Et c’est tant mieux : Feràmia voudrait échapper à une tendance actuelle de l’industrie culturelle, qui nous abreuve de titres dont on connait tout avant même de les avoir écoutés parce qu’ils répliquent inlassablement des recettes, des façons de faire, dont notre oreille est familière. Feràmia n’est ni du « pop-rock », ni du « jazz métissé », ni de « l’electro-lounge-world-tendance Haïti » ou que sais-je encore, ce n’est pas non plus de la musique « fusion ». Leur musique, ils la voudraient louvoyante, surprenante, inconfortable puis sereine, entrainante puis déstructurée. Ici et là, on pourra donc reconnaître l’influence de la musique ethiopienne, la puissance des instrus dub, des refrains aguicheurs, des rythmiques électro, ou encore l’influence de grands noms jazz américain, et on pourra même assister à une conférence de volatiles.
C’est donc la prosodie de la langue, et l’univers mental qu’elle porte qui intéresse Feràmia, et musicalement, tout ce qui leur passe sous la main. Ainsi dans le premier album, "Lo drac pòt èsser tanben una soca" , à côté des poèmes du début du XXeme siècle, comme Lafont, Rouquette, Camproux, Cordes, Gualtier ou Allier, figurent trois textes originaux, qui s’inspirent de l’imaginaire occitan. Pour Feràmia, c’est un langage qui peut servir à exprimer tout autant ce qui a été que ce qui va être. La pastourelle, la bergère de « Quora vendrà », peut être une véritable bergère, mais aussi une anarchiste véganomaniaque, une caissière au poignet meurtri, une geek surmenée, une actionnaire qui scrute anxieusement les présages de la bourse, ou même ta mère. A l’auditeur d’en décider. Feràmia c’est un groupe modeste et encore jeune, qui ne demande qu’à partager et à construire un univers nouveau, avec vous public adoré qui va acheter notre album et venir voir nos concerts.
Feràmia chante en occitan mais ne se fait pas conservateur de musée. C’est la prosodie de la langue et l’univers mental qu’elle porte qui a motivé ce choix. Si de nombreux morceaux sont issus du patrimoine littéraire occitan (adaptations de poèmes de Robert Lafont, Léon Cordes …), le but est d’emmener cette langue vers de nouveaux territoires sonores. Musique en occitan, mais non musique occitane, le quintet traite cette langue comme un instrument à part entière. Il en va de même pour l’imaginaire occitan, et notamment son bestiaire fantastique. Avec Feràmia, La tarasque, monstre hybride dont on raconte en Provence qu’elle fut domptée à coup d’eau bénite, se rebiffe, et part pour sa propre croisade qui la mènera jusqu’au rivage de l’Uruguay, où elle rencontrera les tambours du Candombe. Et pendant ce temps, le Drac, le diable occitan, est sorti de l'étable et joue maintenant des tours dans le métro toulousain.